Sale temps pour Tokyo. A un peu plus de quatre mois du choix du CIO de la ville hôte des Jeux d’été de 2020, la candidature japonaise vient de se découvrir un nouveau point faible. Inattendu mais plutôt fâcheux : son président. Naoki Inose, le gouverneur de Tokyo, s’est laissé aller à critiquer le dossier d’Istanbul, principal rival dans la course aux JO, à l’occasion d’une interview accordée au New York Times. Un dérapage verbal qui pourrait avoir des conséquences néfastes pour Tokyo 2020.
Au-delà de la manière, pas vraiment fair-play, et de la nature des propos, assez peu élégante, la démarche de Naoki Inose pose un problème sérieux pour la candidature japonaise : elle enfreint la règle 14 du code de conduite du CIO pour les villes candidates aux Jeux. Une règle très stricte, comme tout ce qui émane de l’institution olympique, où il est écrit noir sur blanc et sans nuance qu’il est interdit à une candidature de critiquer d’une façon ou d’une autre une ou plusieurs de ses rivales. Aucun commentaire pouvant ternir l’image d’un concurrent n’est toléré. Pire : il est même interdit d’oser la moindre comparaison avec un autre dossier. En clair, les candidats peuvent parler d’eux autant qu’ils le veulent, mais en se gardant bien de s’exprimer sur la concurrence.
A New York, Naoki Inose a oublié cette règle. Interrogé par deux journalistes du quotidien, tous deux excellents spécialistes du Japon et parlant le japonais, le gouverneur a magnifié les atouts de la candidature de Tokyo, vantant les mérites de la culture japonaise, de son hospitalité et la qualité des infrastructures sportives déjà existantes. Surtout, le dirigeant asiatique a critiqué Istanbul et la Turquie. Reprenant de volée l’un des atouts mis en avant dans le dossier turc, à savoir la jeunesse de sa population, Naoki Inose a expliqué : « Ils ont peut-être beaucoup de jeunes, mais s’ils meurent jeunes, cela n’a pas beaucoup d’intérêt. »
Autre propos du gouverneur de Tokyo contraire aux règles du CIO, cette remarque d’ordre religieux : « Les pays islamistes, la seule chose qu’ils ont en commun est Allah, et ils passent leur temps à se combattre les uns les autres. »
A Tokyo, les propos du gouverneur ont plongé l’équipe de candidature dans un certain embarras. L’un de ses porte-paroles a tenté de calmer le jeu en expliquant au New York Times que Naoki Inose n’avait pas voulu critiquer Istanbul, et que Tokyo avait le « plus grand respect » pour ses deux rivales. A Istanbul, l’équipe de candidature a joué profil bas, se contentant d’un bref communiqué assurant ne vouloir faire aucun commentaire. A Lausanne, au siège du CIO, la commission d’éthique devrait se pencher prochainement sur l’affaire et discuter d’une éventuelle réprimande à adresser aux Japonais.
Une chose est sûre : les propos tenus par Naoki Inose lors de cette interview réalisée à New York trahissent une forme d’inquiétude de la candidature japonaise face à la progression du dossier turc. Tokyo craint Istanbul. Au point de commettre certaines erreurs.