Tout ça pour ça. Menacée d’exclusion par la commission exécutive du CIO en février dernier, la lutte a sauvé sa tête et son avenir, dimanche après-midi à Buenos Aires. L’Assemblée générale de l’institution olympique l’a préféré au squash et au baseball–softball, au moment de choisir un sport à intégrer au programme des Jeux de 2020. Un retour à la case départ, donc. Logique, crédible et justifié. Mais peu à l’avantage de l’image du CIO.
Dans le détail, les membres du CIO ont accordé 49 voix à la lutte, contre 24 au baseball–softball, qui faisaient cause commune, et 22 au squash. Un résultat sans équivoque, mais presque connu d’avance. Il se disait un peu partout, depuis plusieurs semaines, que la lutte resterait dans la place.
A l’arrivée, la lutte y a gagné une formidable publicité, ô combien inespérée pour une discipline peu médiatique. Et elle s’est découvert des alliés et des soutiens sur toute la planète, jusqu’à Vladimir Poutine, le président russe. Les deux autres candidats ont dépensé gros, en lobbying et communication, pour un bilan nul. Quant au CIO, il a révélé une certaine incompréhension entre la majorité des membres et le petit groupe de décideurs de la commission exécutive.
Un fossé que Jacques Rogge a tenté d’expliquer en pointant les lacunes de la lutte et de sa fédération internationale. « Je ne peux pas voir dans la tête de chacun de mes 14 collègues de la commission exécutive », a suggéré Jacques Rogge. Cependant au fil des discussions, j’ai su que la gouvernance de la Fédération internationale de lutte à cette époque n’était pas optimale: il n’y avait pas de sportif avec un droit de vote au conseil exécutif, ni au niveau de l’assemblée générale, pas de commission des athlètes, pas de femme au conseil exécutif et les règles manquaient de clarté et n’étaient pas forcément comprises du grand public. Il y avait un certain nombre de choses inadéquates et c’est pour cela que la commission exécutive a pris cette décision. »
Pour la lutte, ces sept mois de crise ont été salvateurs. Poussée le dos au mur, la FILA a soufflé sur la poussière qui avait fini par recouvrir ses compétitions et ses règlements. Ses catégories de poids ont été changées, la durée des combats réduite, sa gouvernance réformée.
« C’est un euphémisme de dire qu’aujourd’hui est le jour le plus important pour notre sport en trois mille ans d’existence, a osé Nenad Lalovic, le nouveau patron de la Fédération, en s’adressant aux membres du CIO. La lutte a appris la leçon. »
Conséquence de cette « affaire »: l’Association des fédérations olympiques d’été (ASOIF) souhaite qu’à l’avenir l’examen porte non plus sur les sports dans leur globalité, mais sur toutes les compétitions et disciplines de tous les sports. Certaines trop similaires pourraient être ainsi supprimées pour faire de la place à de nouveaux sports, afin de rester dans la limite de 10.500 athlètes fixée par la charte olympique.
— Publié le 7 septembre 2013