Le ballon ovale tourne de moins en moins rond. Depuis dimanche 22 septembre, il prend une direction très incertaine. Après des mois de palabres et de menaces en tous genres, les meilleurs clubs français et anglais ont sans doute signé l’acte de décès de la Coupe d’Europe dans sa version actuelle, en annonçant la création de la Rugby Champions Cup, une nouvelle compétition continentale qui pourrait débuter dès la saison 2014-2015.
Les ligues française (LNR) et anglaise (Premiership rugby) voulaient une refonte totale de la compétition. Elles le répétaient. Mais, lassées de ne pas être entendues, elles ont décidé de passer en force. Elles ont précisé, dans un communiqué, que « les conditions d’organisation sportive, commerciale et financière seront présentées au cours du mois d’octobre. Cette nouvelle Coupe d’Europe sera ouverte aux équipes des trois ligues professionnelles en Europe », soit le Top 14, le championnat d’Angleterre et la Ligue celtique (qui réunit des franchises écossaises, galloises, irlandaises et italiennes).
Une révolution, rien de moins, dans un sport où le conservatisme a longtemps été le maître mot. L’annonce de la création prochaine de la Rugby Champions Cup marque en effet la fin de la Coupe d’Europe, une compétition grée par l’ERC, une société commerciale dont les actionnaires sont les Fédérations et les ligues, et qui a atteint en 2011 un chiffre d’affaires de 50 millions d’euros.
Comment en est-on arrivé là? Pour résumer, les discussions entre les ligues professionnelles et l’ERC ont tourné autour de trois sujets, sans jamais aboutir.
– Une refonte de la formule. Anglais et Français souhaitaient la réduction de 24 à 20 du nombre de clubs engagés. Mais en conservant le même nombre d »équipes anglaises et françaises, six pour chacun des deux pays, la diminution touchant les représentants écossais, gallois, irlandais et italiens, qui seraient passés de 10 à 6. Les vainqueurs de la Coupe d’Europe et du Challenge européen compléteraient le tableau.
– Une réforme du calendrier. Les clubs anglais, et surtout français, réclamaient une modification du calendrier afin de terminer les compétitions européennes fin avril et donner plus de continuité à la phase finale du Top 14. Une demande compliquée, mais qui semblait sur le point d’être acceptée.
– Une nouvelle répartition financière. L’argent, encore et toujours. Français et Anglais, qui estiment apporter beaucoup à l’économie de la Coupe d’Europe, n’étaient pas satisfaits de la répartition financière en vigueur au sein de l’ERC. Actuellement, le partage du gâteau se fait en trois parts: 25% pour la LNR, 25% pour Premiership rugby et 50% pour les nations de la Ligue celtique. Les ligues française et anglaise militaient pour un système de « trois tiers » (33% chacun).
A la Fédération française de rugby, on juge cette annonce « hors de propos et inadaptée ». On rappelle aussi que les clubs ne peuvent participer à une compétition internationale sans l’accord de la FFR. Du côté anglais, le week-end n’a été marqué par aucune prise de position officielle.
Une chose est sûre: le projet doit être avalisé par l’IRB (International board, organe suprême du jeu), jusque-là silencieux. Sa réponse est très attendue. Elle pourrait être décisive.