La tradition du syndicalisme à la française s’étend jusqu’au football. Elle le doit à un homme: Philippe Piat. Cet ancien pro, à l’époque où la Ligue 1 se faisait encore appeler Première division, a été désigné président de la FIFPro, le syndicat mondial des joueurs. Une casquette qu’il portera en plus de celle de patron de l’UNFP, l’Union nationale des footballeurs professionnels français.
Cette décision du Board doit encore être entérinée fin octobre par l’Assemblée générale de la Fédération Internationale des Associations de Footballeurs Professionnels (FIFPro). Mais cette dernière étape est présentée comme une formalité. Défenseur des droits des joueurs depuis la fin des années 60, Philippe Piat, 71 ans, a déjà occupé la fonction présidentielle entre 2005 et 2007. Il devrait entamer cet automne un mandat de quatre ans, jusqu’en 2017.
Le communiqué de l’UNFP annonçant la désignation de Philippe Piat ne fait pas dans la nuance. Il dresse la liste des chantiers qui attendent le futur patron du syndicat mondial des joueurs. Un état des lieux qui laisse perplexe: statut standard pour tous les joueurs, système des transferts, paris (en ligne ou pas), code mondial antidopage, développement en Europe de l’Est, Afrique et Asie, 50e anniversaire de la FIFPro, relations avec la FIFA, l’UEFA, l’ECA (Association européenne des clubs), l’association des ligues professionnelles européennes et la Commission européenne…
Par où commencer? Philippe Piat n’en fait pas mystère, il veut avant tout s’attaquer au système des transferts. Avec une idée fixe: travailler dès maintenant sur la constitution d’une plainte auprès de l’Union européenne, pour reformer en profondeur les lois du mercato. Il le dit: « Le football est plongé dans un monde de fous. Il échappe à toutes les règles. C’est une bulle financière, avec des joueurs qui touchent des salaires sans rapport avec leur valeur. Mais il sont des centaines, en Espagne ou en Europe de l’est, à ne plus être payés. »
Pas simple. Mais Philippe Piat a ses idées. La première: instaurer une période dite « protégée » de trois ans pendant laquelle ni le joueur ni le club ne peuvent rompre le contrat les liant, sous peine de sanctions. Surtout, le futur président de la FIFPro attend de la FIFA qu’elle joue le rôle du gendarme, en régulant le marché, en accord avec les règles de l’Union européenne et le Code du travail. Il prône aussi la fin du mercato d’hiver.
Philippe Piat le dit et le répète: le football moderne fonce tout droit dans le mur. « Quand je vois que Gareth Bale a été acheté par le Real Madrid pour une centaine de millions d’euros, et que Lionel Messi ne pourrait quitter le Barça que contre 500 millions d’euros, je me dis que ça suffit. Il faut revenir au droit du travail, comme tout salarié normal. Les clubs sont des sociétés commerciales, certaines même cotées en bourse. Il ne devrait plus être possible d’avoir un système avec des spécificités donnant des droits aux uns et aux autres qui ne correspondent plus aux règles du travail. » Vaste chantier.