La journée du mardi 4 mars 2014 marque une date, certes symbolique, mais quelque peu effrayante pour le Brésil: J – 100 avant le grand soir du match d’ouverture de la Coupe du Monde de football 2014. A Zurich, siège de la FIFA, le président Sepp Blatter s’est fendu d’une vidéo pour assurer, main sur le coeur, que tout serait prêt à temps et que les problèmes étaient désormais « tous sous contrôle ». Très en verve, le dirigeant suisse a juré que, dans 100 jours, serait donné le coup d’envoi d’une « exceptionnelle compétition. » A Brasilia, capitale du pays, la présidente Dilma Rousseff martèle depuis des semaines que le Brésil va réaliser « la Coupe du monde des Coupes du monde ». Mais ils sont bien les seuls à ne pas regarder le compte-à-rebours avec angoisse.
Les douze stades devaient être livrés au plus tard le 31 décembre 2013, pour que la FIFA puisse y effectuer tous les tests nécessaires. Cinq ne sont pas encore prêts. L’enceinte de Sao Paulo, où est prévu le match d’ouverture, le 12 juin, ne sera pas prête avant le mois de mai. Le stade de Curitiba, très dangereusement hors délai, a frôlé le carton rouge. Il n’a dû son maintien qu’à l’engagement de la présidente, soucieuse d’éviter un cuisant camouflet. Même retard pour celui de Manaus, dans la forêt amazonienne.
Autre motif d’inquiétude: l’hostilité populaire. Dans un pays où le football est souvent présenté comme une religion, le Mondial 2014 cristallise le mécontentement de la rue. Un récent sondage, publié en février, laisse apparaître un nombre de record de Brésiliens opposés à une Coupe du Monde qu’ils considèrent comme « réservée aux riches. » Le pourcentage de Brésiliens soutenant la tenue du Mondial dans le pays a chuté de 79% en 2009 à 52%.
Les manifestations convoquées à Rio de Janeiro et Sao Paulo par la mouvance d’extrême gauche et les anarchistes masqués du Black Bloc dégénèrent systématiquement en violents affrontements. Le 6 février, un cameraman de télévision a été tué à Rio par une fusée d’artifice allumée par des manifestants.
Les Brésiliens, massivement hostiles à ces violences, sont 80% à assurer qu’ils ne manifesteront pas pendant le Mondial. L’humeur n’en est pas moins à la grogne. Les promesses d’une Coupe du Monde financée à 100% sur fonds privés n’ont pas été tenues. Une partie du plan initial de transports a été abandonné en route. Il est déjà acquis, par exemple, que les travaux d’agrandissement de plusieurs aéroports obsolètes et saturés ne seront pas achevés pour le Mondial.