Médaillé d’or en biathlon aux Jeux de Turin en 2006, Vincent Defrasne n’a pas quitté l’univers olympique. Il a coordonné le programme des « athlètes modèles » du CIO. A ce titre, le Français était présent, l’été dernier, aux Jeux de la Jeunesse d’été à Nankin. Observateur avisé du mouvement olympique, il a expliqué à FrancsJeux quel regard il portait sur le dossier de Paris 2024 et sur la course aux Jeux d’hiver de 2022 entre Almaty et Pékin.
FrancsJeux: Que pensez-vous de la façon dont Paris a préparé le terrain avant de se déclarer candidate aux Jeux d’été en 2024?
Vincent Defrasne: Je trouve la démarche pertinente et méthodique. Les gens qui portent le dossier ont pris le temps de poser les choses avant de se lancer. Ils ont longuement réfléchi aux questions essentielles: avec qui, comment et pourquoi.
A la différence des candidatures passées, les athlètes devraient être placés en première ligne…
C’est très bien. Il le fallait. Mais la volonté de mettre les athlètes au premier rang de la candidature ne doit pas être un leurre. Il doivent travailler concrètement, mettre les mains dans le moteur. Le piège serait de prendre des athlètes sapins de Noël. En les utilisant bien, ils peuvent devenir une vraie valeur ajoutée. Mais attention à ne pas tomber dans une extrême opposée: les athlètes ne peuvent pas tout faire. Le dossier est tellement large et complexe qu’il faudra savoir faire appel à des expertises très pointues dans de nombreux domaines.
Avez-vous été sollicité pour rejoindre la candidature?
Pas plus que cela. J’ai collaboré très étroitement avec le CIO jusqu’en novembre dernier. Puis il m’a fallu faire un choix et me consacrer un peu plus à mon employeur, la société Somfy (l’un des partenaires officiels de l’équipe de France de biathlon, ndlr).
Que pensez-vous de la volonté de modernisation du CIO engagée dans le cadre de l’Agenda 2020?
Je la soutiens à fond. L’Agenda 2020 peut changer la donne. Il permet d’ouvrir le mouvement olympique, de le rendre moins strict et plus souple. Mais il est encore trop tôt, je crois, pour affirmer que ces réformes auront un réel impact. La démarche se jugera sur le long terme. Attendons, par exemple, de voir si les nouvelles règles de candidature pousseront des pays nouveaux à se lancer dans l’aventure. Aujourd’hui, ce n’est pas encore évident. Sur le principe, l’Agenda 2020 est une bonne chose, mais il faut attendre avant de juger.
Le CIO doit choisir, le 31 juillet 2015, entre Almaty et Pékin la ville-hôte des Jeux d’hiver de 2024. En votre qualité de champion olympique de biathlon, quel regard portez-vous sur cette course à deux?
Je regrette qu’elle soit si réduite en nombre de candidats. Le choix est restreint, avec seulement deux pays, tous les deux asiatiques. Pékin organiserait à coup sûr de bons Jeux d’hiver, mais nous y étions en 2008 pour les Jeux d’hiver. Et les Chinois ont eu les Jeux de la Jeunesse l’an passé. Je préférerais que les Jeux aillent dans un pays nouveau, comme le Kazakhstan. Il serait bon, je crois, de partager l’idéal olympique avec des nations émergentes. Je suis bien placé pour savoir que les Jeux ont le pouvoir de transformer une ville ou une région. Ils peuvent tellement améliorer les choses qu’il serait dommage, à mon sens, d’en priver certains pays pour les donner toujours aux mêmes.