Les comités nationaux olympiques ne pèsent pas tous le même poids. Pour les plus petits, et les moins fortunés, la modestie est la règle et l’assistanat une nécessité. A l’image, par exemple, du Burkina Faso. Le président du comité olympique de cet état africain de 18 millions d’habitants, Jean Yameogo, a expliqué à FrancsJeux la réalité économique de son organisation. Et confié sa perception de la course aux Jeux de 2024.
FrancsJeux: Comment vit financièrement le comité national olympique du Burkina Faso?
Jean Yameogo: La réponse est simple: il vit intégralement de l’argent versé par la Solidarité Olympique. Pour nous, c’est de l’or. Nous n’avons par ailleurs aucune aide financière, pas même de l’Etat. Pas un sou. Nous avons donc choisi d’exploiter à fond tous les programmes proposés par la Solidarité Olympique, ceux destinés aux athlètes, aux entraîneurs et mêmes ceux consacrés aux valeurs de l’olympisme. Notre souhait est que ces programmes durent le plus longtemps possible. Sans eux, il n’y aurait plus de comité olympique.
Concrètement, comment vous organisez-vous?
Nous avons mis en place une structure, au sein du CNO, chargée de remplir les dossiers et d’affecter l’argent de la Solidarité Olympique. Je m’en suis longtemps occupé. Depuis mon élection à la présidence, en 2013, j’ai formé des gens à me succéder. Il faut savoir que les sommes versées par la Solidarité ne constituent pas des subventions. Elles correspondent à des programmes précis. Par exemple, nous avons reçu 20.000 dollars pour le sport et 15.000 dollars pour l’éducation.
A qui va cet argent?
En premier lieu, aux athlètes. Nous avons, au Burkina, cinq athlètes boursiers de la Solidarité Olympique. L’argent leur est versé. Nous affectons également de l’argent aux voyages des athlètes pour des stages ou des compétitions à l’étranger. Et nous aidons financièrement l’équipe nationale de handball. L’argent de la Solidarité Olympique doit avoir une destination précise et connue à l’avance.
Comment expliquez-vous l’absence d’aide financière de la part de l’Etat?
Tout est une question de politique. Au Rwanda, par exemple, le développement du sport s’inscrit dans une stratégie nationale. Au Burkina, ce n’est pas le cas. Notre actuel ministre des Sports, même s’il vient de l’Armée, est issu du mouvement sportif. Il a promis de nous aider pour la préparation des Jeux olympiques. Nous allons bien voir. Nous espérons envoyer cinq athlètes aux Jeux de Rio, l’an prochain, en athlétisme, en judo et peut-être en natation.
Quel rôle peut jouer, pour un CNO comme le vôtre , l’Association francophone de comités nationaux olympiques?
L’AFCNO s’implante petit à petit. C’est un début, il faut l’encourager. Vous savez comment sont les anglo-saxons, ils veulent s’imposer. Nous devons résister. Mais l’AFCNO n’apporte pas encore d’aide aux athlètes et aux entraîneurs.
Il est souvent question d’une candidature de l’Afrique aux Jeux olympiques. Qu’en pensez-vous?
Je suis Africain, je soutiens donc le projet. Mais à part l’Afrique du Sud ou un pays du Maghreb, je ne vois pas qui pourrait s lancer dans un tel projet. Dans les autres pays, nous avons déjà du mal à qualifier nos athlètes aux Jeux.
Depuis le Burkina Faso, comment voyez-vous la course aux Jeux d’été de 2024?
Pour un pays de l’Afrique francophone comme le Burkina, il ne fait aucun doute que la victoire de Paris servirait nos intérêts. La France mérite d’organiser les Jeux. Elle en a les moyens. Si Paris l’emportait, nos athlètes pourraient aller s’y entraîner plus facilement. L’Afrique francophone en profiterait, c’est une évidence.