Jeux olympiques ou Exposition universelle? La maire de Paris, Anne Hidalgo, a longtemps hésité, avant de pencher définitivement pour l’événement sportif. En Italie, le pays n’a pas choisi. Milan accueille, depuis vendredi 1er mai, l’Expo universelle 2015. Rome, la capitale, s’est lancée dans la course aux Jeux d’été en 2024.
A la lecture des récents commentaires, le mélange des genres n’est pas sans danger. Avant même son inauguration, l’Expo Milan 2015 avait cristallisé toutes les critiques. Et mis en lumière, une nouvelle fois, les difficultés de l’Italie à mener à bien un projet national sans odeurs de scandales.
Des soupçons d’appels d’offres truqués ont éclaté, dans la presse italienne, dès le début d’année 2014. Au mois de mai dernier, plusieurs hommes politiques et responsables de chantiers ont été arrêtés. La presse italienne a suggéré des liens avec la mafia. Le commissaire du gouvernement pour l’Exposition s’est plaint publiquement de ne pas « avoir pu accorder un seul marché à une société offrant le prix le plus avantageux. »
Tout aussi classique, les travaux de l’Expo ont accusé des retards nombreux et souvent mal expliqués. Une visite était prévue le 29 avril pour les médias internationaux. Elle a été annulée au dernier moment, les organisateurs italiens jugeant peu opportun de promener dans les allées et les pavillons une colonie de reporters internationaux au milieu des ouvriers s’activant nuit et jour.
Autre souci: l’argent. Près de 3,2 milliards d’euros ont été dépensés pour l’Expo 2015, dont 1,35 milliard d’argent public. Plutôt cher pour une manifestation organisée entre deux bretelles d’autoroute, dans un quartier jugé par les Milanais eux-mêmes comme « l’un des plus moches » de la ville. Une somme d’autant plus mal perçue par la presse et l’opinion qu’il ne devrait rien rester de l’Expo une fois l’événement terminé, le 31 octobre prochain, à l’exception notable du Pavillon italien.
Question: l’Expo universelle de Milan plombera-t-elle la candidature de Rome pour les Jeux de 2024? A Boston, Hambourg ou Paris, on l’espère. Dans une telle compétition, le malheur des uns fait le bonheur des autres. Logique. Pourtant, la réponse est loin d’être affirmative.
Première nuance: le timing. L’Expo universelle fermera ses portes six semaines seulement après la date de dépôt des candidatures pour les Jeux de 2024. La course olympique ne fera que commencer. Et, comme aime le rappeler Bernard Lapasset, le patron du projet parisien, elle « ressemble infiniment plus à un marathon qu’à un sprint. » Les affaires de corruption et les retards dans les travaux seront alors certainement oubliés. L’Italie pourra même mettre en avant le succès populaire d’une manifestation où elle espère attirer 20 millions de visiteurs.
Deuxième paramètre: l’héritage. Philippe Ridet, le correspondant du Monde à Rome, l’expliquait à la veille de l’ouverture: « L’Exposition universelle de Milan laissera en héritage (…) l’Autorité nationale anti corruption, désormais bien aguerrie ». Et elle « peut toujours servir », insiste le journaliste en évoquant la candidature de Rome pour les Jeux de 2024. En clair, l’Italie est désormais dotée d’une arme anti mafia qu’elle pourra utiliser dans sa campagne pour les Jeux de 2024 comme d’un gage de sa volonté de transparence.
Conclusion: il semble aujourd’hui très hasardeux de penser que les difficultés rencontrées par l’Italie pour Milan 2015 pourraient avoir un effet dévastateur sur le projet Rome 2024. Dans une course olympique, la décision se fait souvent, dans un sens comme dans l’autre, au cours des derniers mois, voire des ultimes semaines. Mais l’équipe de la candidature italienne devra soigner sa communication pour éviter les risques d’amalgame.