Londres 2012, Sotchi 2014, Tokyo 2020… La question des coûts refait surface à la façon d’un serpent de mer aux Jeux olympiques. Les budgets dérapent, les dépenses deviennent souvent hors de contrôle. Depuis décembre 2014, l’Agenda 2020 du CIO a pour ambition d’inverser la tendance en prônant des projets mieux maîtrisés et des dispositifs plus responsables. Crédible ou illusoire? A l’heure où les quatre villes candidates aux Jeux de 2024 proposent une vision low-cost de l’événement, FrancsJeux a interrogé un expert du marketing sportif, Michael Tapiro, le président de l’école Sports Management School.
FrancsJeux: L’Agenda 2020 du CIO a inscrit parmi ses résolutions les plus importantes une réduction du coût des Jeux olympiques. Est-ce réaliste?
Michael Tapiro: Oui et non. Il est normal que le CIO incite à plus de mesure dans les budgets des Jeux. Le temps du bling bling est terminé, la crise est passée par là, sauf dans des pays comme la Russie et la Chine, où il est quasi impossible de connaître la réalité des chiffres. Mais la tendance au low-cost me semble plus une posture qu’une réalité. On annonce des budgets de 4 à 6 milliards d’euros, mais on découvre qu’ils coûtent finalement 10 à 12 milliards. Les coûts de construction sont réduits, mais les organisateurs sont souvent contraints de rajouter des lignes à leurs comptes. Aux Jeux, les budgets déraperont toujours.
Où se situent les « zones à risques », où il s’avère difficile de contrôler les coûts?
Hier encore, la réponse était facile: les infrastructures. Aujourd’hui, des candidatures comme Paris, Los Angeles ou Rome proposent des dispositifs où les constructions sont presque toutes existantes. Le temps des grands chantiers olympiques est révolu. On construit désormais utile. Un bon exemple: le Mondial de football au Qatar en 2022. Les Qataris proposent des stades démontables qui seraient exportés vers l’Afrique une fois la compétition terminée. Mais les surcoûts restent nombreux, ils se glissent entre les lignes. Réunir les contractants pour la construction d’un village des athlètes, par exemple. Ou, encore, répondre aux attentes des municipalités concernées de près ou de loin par les Jeux.
A ce titre, comment se présente la course aux Jeux de 2024?
Elle met aux prises les villes de quatre pays occidentaux, aux approches budgétaires assez équivalentes, très raisonnables. Les risques de dérapages budgétaires sont minimisés par l’absence de chantiers de très grande envergure. Paris, notamment, a la chance de posséder déjà l’essentiel des équipements sportifs. Il faudrait seulement construire une piscine olympique.
Est-il raisonnable de penser que les Jeux, désormais, payent les Jeux et se révèlent presque toujours bénéficiaires?
Avec la nouvelle donne, une ville qui accueillerait les Jeux s’y retrouverait largement. Mais le retour sur investissement est souvent plus long qu’annoncé. Les bénéficies ne sont pas toujours immédiats, ils se mesurent sur le long terme. Barcelone, par exemple, tire encore aujourd’hui profit des Jeux d’été en 1992.
Quels avantages économiques pourrait gagner une ville comme Paris de l’organisation des Jeux en 2024?
Les Jeux pourraient lui permettre de réaliser un bond en avant important en termes de transports publics. Surtout, Paris pourrait en profiter pour devenir un pôle majeur du sport-business sur le plan mondial.