Qu’on ne s’y trompe pas: l’Euro 2016 de football ne sera pas un événement français. Ses stades le seront, ses frontières également. Mais le tournoi continental dépassera largement le seul territoire de la France. Par son public (2/3 tiers d’étrangers sur les 2,5 millions de spectateurs attendus), son impact économique, ses forces de sécurité. Et, moins attendu, son empreinte sur le mouvement sportif international.
A écouter Jacques Lambert, le président du comité d’organisation, l’Euro 2016 de football en France pourrait marquer un tournant dans l’histoire et l’évolution des grands événements sportifs internationaux. Il y aurait un avant et un après. Pour l’Europe, et sans doute pour la planète entière. Le Français l’a expliqué à sa manière, d’une voix posée mais d’un ton ferme, ce mardi 5 avril dans un salon écrasé de dorures de l’ambassade de Grande-Bretagne à Paris, à un jet de pierre du Palais de l’Elysée. Invité à s’exprimer dans le cadre d’une journée de débats sur « l’importance grandissante du marché français du sport », Jacques Lambert a lâché cet aveu: « A l’Euro 2016, la question de l’avenir des grands événements sportifs internationaux sera posée. Nous ne pouvons pas faire autrement que regarder plus loin que le tournoi et que la France. Cet Euro aura un retentissement sur l’avenir. Nous ne sommes pas des organisateurs isolés. Tous les autres, en Europe et ailleurs, auront des leçons à tirer du tournoi, y compris si tout s’y passe parfaitement bien. »
Au cœur de la réflexion de Jacques Lambert: la sécurité. L’un des enjeux principaux de l’événement. A coup sûr le plus médiatique du moment. Depuis les attentats du 13 novembre dernier à Paris, les moyens ont été renforcés pour prévenir les risques d’attaques terroristes. A l’Euro, ils seront européens. Plus de 300 policiers venus de l’ensemble du continent seront présents en France pendant le tournoi. Jacques Lambert insiste: « Notre effort de sécurité sera solidaire. Nous devons apporter à la menace une réponse européenne collective. »
Moins visible, la dimension économique de l’événement s’annonce elle aussi très continentale. Certes, l’impact de l’Euro a été mesuré jusque-là avec un prisme très franco-français. Il devrait atteindre 1,2 milliards d’euros pour l’économie nationale, avec une prévision de recettes fiscales pour l’Etat estimée à 200 millions d’euros. Mais Jacques Lambert avance ses chiffres, entendus comme un doux refrain, ce mardi 5 avril à l’ambassade de Grande-Bretagne, par une assistance à moitié britannique: « Pas moins de 17% des billets de l’Euro ont été achetés par des spectateurs du Royaume-Uni. Et 7% des packages d’hospitalité ont été acquis par des entreprises britanniques. L’Euro s’annonce comme le plus grand club d’affaires de l’année 2016. Au dernier tournoi continental, organisé en 2012 par l’Ukraine et la Pologne, 1.200 entreprises venues de 60 pays étaient présentes dans les loges des stades et les villages d’hospitalité. » Elles pourraient être encore plus nombreuses à partir du 10 juin 2016 en France.
Un avant et un après Euro 2016, donc. Y compris, surprise, pour la ville de Paris. Jean-François Martins, l’adjoint au maire de la capitale chargé des Sports, l’explique: « Le tournoi continental de football marquera la première étape d’un processus destiné à faire du sport l’un des éléments majeurs du développement de Paris, tout à la fois pour le tourisme et l’économie. » Paris, ville sportive? A ce stade de l’histoire, l’image peut sembler encore imprécise et la promesse audacieuse. Mais les choses peuvent changer, même rapidement. Jean-François Martins le rappelle avec une pointe de fierté: « Nous venons de prouver au dernier Marathon de Paris, dimanche 3 avril, que nous pouvions faire courir en toute sécurité 50.000 participants dans les rues de la capitale. » Pas mal.