Candidatures

« Les Jeux ne sont pas la priorité des Romains »

— Publié le 23 juin 2016

L’espoir aura été de courte durée. Au soir de son élection à la mairie de Rome, dimanche 19 juin, Virginia Raggi avait laissé entendre que le projet olympique de la capitale italienne avait un avenir. Elle ne l’avait pas signifié mot pour mot, se gardant bien de se laisser emporter par l’euphorie de la victoire, mais sa décision de placer à la direction des sports de la ville l’ancien rugbyman Andrea Lo Cicero, un partisan de la première heure de Rome 2024, avait été interprétée comme un signe fort de sa volonté de tenter l’aventure. A l’évidence, il s’agissait d’un écran de fumée.

Pour sa première interview depuis son élection à la mairie de Rome, l’avocate italienne s’est montrée plus précise. Et nettement plus claire dans ses intentions. « Ma position n’a pas changé, a-t-elle expliqué à la chaîne de télévision Euronews. Au jour d’aujourd’hui, les Jeux de 2024 ne constituent pas la priorité des Romains. »

Sans grande surprise, la candidate du Mouvement 5 Etoiles évoque l’argument économique. « Avec une dette cumulée de 13 milliards d’euros, Rome ne peut pas se permettre de creuser encore son déficit en construisant des cathédrales dans le désert. » Dans l’équipe de Rome 2024, Luca di Montezemolo, le président de la candidature, et Giovanni Malago, son homologue du comité olympique (CONI), ont dû en tomber de leur chaise. Depuis l’adoption par le CIO de l’Agenda 2020, les Jeux ont cessé de représenter pour les villes organisatrices un puits sans fond de dépenses en infrastructures. En théorie, au moins. Mais Virginia Raggi l’ignore. A moins qu’elle n’ait pas cru un mot des discours rassurants et raisonnables des porteurs du projet olympique.

Pour preuve les chiffres cités par l’avocate italienne sur Euronews. Virginia Raggi a évoqué le souvenir des Jeux de Montréal en 1976, tellement dispendieux qu’il a fallu 30 ans aux contribuables de la ville canadienne pour en effacer l’ardoise. « Je ne parle pas des problèmes de corruption, je parle des chiffres, a insisté la jeune femme. Toutes les données historiques s’accordent pour dire que les coûts ne sont pas viables. Plusieurs villes ont déjà retiré leur candidature pour ces raisons là. Mon « non » aux Jeux est clair. »

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Pour autant, Virginia Raggi ne se dit pas opposée aux dépenses sportives. Mais, pragmatique, elle préfère se concentrer sur le quotidien, sans rechercher l’exceptionnel. « Rome possède déjà plus de 160 installations sportives, dont la plupart tombent en ruines. Personne ne s’est vraiment occupé de les maintenir en état ou de les rénover. Commençons par là. »

Les déclarations de la nouvelle maire de Rome sonnent-elles le glas de la candidature italienne? Probable. Giovanni Malago ne cache pas son pessimisme. « Nous avons besoin, pour conserver nos chances, du soutien du CONI, du gouvernement et de la ville, avait-il expliqué en début de semaine. Si l’un d’eux se désiste, la candidature en sera très affaiblie. » Le président du CONI a confié que Virginia Raggi avait rendu visite au comité de candidature avant l’élection. Une visite au cours de laquelle la jeune femme n’avait pas manifesté, selon Giovanni Malago, « une opposition très claire » au projet olympique.

Un retrait de Rome de la course aux Jeux de 2024 laisserait seulement trois candidats en lice: Budapest, Los Angeles et Paris. Pas vraiment une bonne nouvelle pour le CIO, déjà très embarrassé de voir la lutte pour les Jeux d’hiver en 2022 réduite à un duel entre Almaty et Pékin. Pas une bonne nouvelle non plus pour l’avenir du mouvement olympique en Italie. En 2012, le Premier ministre Mario Monti avait mis fin à la candidature de Rome pour les Jeux de 2020, invoquant une situation fiscale incompatible. Un deuxième retrait consécutif pourrait être le dernier.