Appelons cela une hécatombe. Mardi 28 juin, un nouveau grand nom du golf mondial s’est rayé lui-même de l’affiche du tournoi olympique de Rio de Janeiro. Jason Day (photo du haut), l’actuel numéro 1 mondial, ne fera pas le voyage vers le Brésil. L’Australien a invoqué Zika pour justifier son forfait, expliquant dans un communiqué qu’il ne voulait prendre aucun risque au moment où sa femme et lui-même ont pris la décision de fonder une famille.
La défection de Jason Day n’est pas la première. Au cours des derniers mois, dix joueurs du circuit professionnel ont mis les pouces. Six d’entre eux l’ont fait en brandissant la peur du virus, dont l’Irlandais Rory McIlroy, quadruple vainqueur d’un tournoi majeur. Curieusement, aucun forfait n’a encore été enregistré parmi les joueuses.
Le résultat se passerait presque de commentaires. Au dernier pointage, effectué mardi 28 juin à la suite de la décision de Jason Day, seulement 18 des joueurs classés dans le top 50 mondial restent en course pour participer au tournoi olympique de golf, le premier depuis 112 ans. Mais ce nombre pourrait prochainement diminuer. Jordan Spieth, le numéro 2 mondial, réserve encore sa réponse. Il hésite. Pas très bon signe.
Certes, les Jeux de Rio ne seront pas désertés par toute l’élite du golf mondial. Dustin Johnson, le n°3 mondial, dernier vainqueur de l’US Open, a confirmé sa participation. Bubba Watson, Justin Rose, Sergio Garcia et Danny Willett, victorieux du dernier Masters, devraient également honorer de leur présence le parcours olympique.
Il n’empêche, la cascade de forfaits ne constitue pas la meilleure publicité pour un sport dont l’avenir reste incertain aux Jeux. Admis dans le programme olympique en même temps que le rugby à 7, lors de la session du CIO en 2009, le golf est assuré de rester dans le décor jusqu’à Tokyo 2020. Pour la suite, rien n’est moins sûr. Le CIO doit se prononcer l’an prochain par vote sur la question des sports olympiques à partir de 2024. Il lui faudra alors débattre du cas du golf.
A la Fédération internationale de golf, le retrait de Jason Day a été accueilli comme un nouveau coup de poignard. Antony Scanlon, son directeur exécutif, ne cherche plus à justifier les bonnes raisons des uns et des autres de rester à la maison. Tout juste se contente-t-il d’expliquer que la décision des joueurs reste « une affaire personnelle », qu’elle leur appartient et que la Fédération ne peut pas décider à leur place. Mais il précise: « A la fin des Jeux, nous aurons deux beaux champions olympiques. Ils entreront dans l’histoire. Quand les membres du CIO viendront sur le parcours assister aux tournois, ils ne le regretteront pas. Ils verront un sport où le public se trouve proche des joueurs, assez près d’eux pour voir leur passion et leur détermination. »
Peut-être. Sans doute. Mais l’un d’eux, au moins, pourrait bien se rendre sur le parcours en traînant les pieds, peu convaincu de l’intérêt du spectacle. Barry Maister, le représentant du CIO pour la Nouvelle-Zélande, a découvert au cours des dernières semaines la liste des absents s’allonger sans répit. Visiblement, il n’a pas apprécié.
Interrogé récemment par une station de radio néo-zélandaise, le champion olympique de hockey-sur-gazon en 1976 n’a pas mâché ses mots. « Je n’aime pas cela et je ne pense pas que ce sport devrait être conservé aux Jeux dans une telle situation, a suggéré Barry Maister. Maintenant qu’il est admis, le golf doit se montrer à la hauteur de l’événement. Les Jeux doivent attirer les meilleurs. Franchement, un sport qui ne peut pas faire venir ses meilleurs joueurs n’a rien à faire aux Jeux olympiques. »
Barry Maister s’exprimait en son nom, pas en celui de ses confrères du CIO. Mais le Néo-Zélandais n’est pas le seul à observer le parcours de Rio de Janeiro avec suspicion. A Rio de Janeiro, le golf mettra son avenir olympique en jeu. Il jouera très gros.