Thomas Bach aime Paris. Il ne l’a jamais caché. Depuis le week-end dernier, le président du CIO peut se répéter comme une douce musique que la capitale française lui rend volontiers son amour. En moins de 48 heures, entre samedi 1er et dimanche 2 octobre, l’ancien escrimeur y a été reçu comme un chef d’état. Il s’y attendait, mais peut-être pas dans ces proportions.
Pour le recevoir, l’équipe de Paris 2024 avait soigné tous les détails, mélangeant ses cartes avec doigté. Une généreuse dose de sport, bien sûr, pour rappeler au CIO et à son président que la candidature française place les athlètes en première ligne. Une élégante ration de tourisme, tendance historique et culturelle, pour insister sur le caractère unique du patrimoine parisien. Enfin, un indispensable chapitre politique, pour mettre en avant l’unité de toutes les forces de la nation derrière un projet olympique et paralympique où, miracle, droite et gauche parlent la même langue et se tendent volontiers la main.
Le sport, d’abord. Prioritaire, comme il se doit. Habile, l’équipe de Paris 2024 a fait débuter la visite de Thomas Bach par une longue visite de l’INSEP. Moins de trois heures après son arrivée à l’aéroport de Roissy, le président du CIO avait sa tête des meilleurs jours en découvrant l’usine à champions du sport français. Une accolade pour pour le gymnaste Samir Aït-Saïd, victime d’une impressionnante fracture aux Jeux de Rio, un début de conversation avec le perchiste Renaud Lavillenie, une discussion de spécialistes avec les escrimeurs Brice Guyart et Gauthier Grumier, quelques balles échangées avec l’ex pongiste Jean-Philippe Gatien. Sympa et convivial.
En prime, le dirigeant allemand a eu droit à un retour dans le temps. Il a retrouvé deux vieilles connaissances, Bernard Talvard et Frédéric Pietruszka, escrimeurs comme lui, médaillés de bronze aux Jeux de Montréal en 1976 dans une épreuve, le fleuret par équipes, où il avait décroché l’or. « J’ai travaillé 40 ans pour être reçu à l’INSEP. À l’époque, les escrimeurs français refusaient de m’inviter pour ne pas me dévoiler leurs secrets. Maintenant, on m’invite parce que je suis président du CIO. »
Heureux timing, la visite de Thomas Bach a coïncidé avec la tenue à l’INSEP du Forum des athlètes. Commentaire du président du CIO: « Vous voir, tous, étudier des idées nouvelles, des pistes pour les Jeux olympiques, c’est pour moi très touchant, très encourageant pour la candidature. Je ne pouvais pas imaginer un meilleur départ pour ma visite à Paris. J’adore être avec les athlètes. »
La suite? Au moins aussi soignée, mais un peu plus protocolaire. Un dîner dans un grand restaurant parisien, à l’invitation d’Anne Hidalgo, avec les porteurs de la candidature. Une ballade le long des principaux monuments de la Seine à l’occasion de la Nuit Blanche. Le lendemain, dimanche, un déjeuner à l’Elysée avec François Hollande, le chef de l’Etat, et le Premier ministre Manuel Valls. Une visite à la Cité du Cinéma, site du futur village olympique, sur l’Île-Saint-Denis. Un détour par le départ des 10 km de Paris, au Louvre, où Thomas Bach s’est vu confier un pistolet de starter et le privilège de lancer l’épreuve. Enfin, un rendez-vous très symbolique à un jet de pierre de la Tour Eiffel, pour assister à un match de football entre une équipe de réfugiés et un club parisien.
A l’Elysée, Thomas Bach a écouté François Hollande lui assurer, une main sur le coeur, que la sécurité ne devait en aucun cas être une préoccupation pour les membres du CIO au moment de choisir entre Budapest, Los Angeles et Paris, la ville-hôte des Jeux de 2024. « La sécurité, c’est notre priorité majeure, la condition préalable que nous devons assurer aux athlètes du monde entier », a insisté François Hollande. Le président des Français a ensuite offert au président de l’olympisme une véritable relique, un drapeau aux cinq anneaux datant des Jeux de Paris en 1924.
Que faut-il retenir de cette visite express du président du CIO, sa troisième du genre, après avoir effectué pareil exercice à Budapest et Los Angeles? Quelques phrases entendues ici et là, au cours de ces 36 heures réglées comme une partition.
« Je me souviens très bien de nos premières conversations, en 2013, au sujet du projet parisien. Vous m’aviez posé des questions et je vous félicite de ce que vous avez fait des réponses, d’avoir rassemblé les sportifs, les politiques et les Français derrière la candidature. Cela n’a pas toujours été le cas des candidatures françaises par le passé. »
« Paris 2024 touche tous les points de l’Agenda 2020 : la durabilité, l’engagement social, le rôle central des athlètes. »
« A titre personnel, je peux vous dire que je suis vraiment impressionné par l’unité de la France et par l’unité du monde politique et du monde sportif. Et du grand soutien dont bénéficie la candidature dans la population ».
Thomas Bach est reparti, dimanche 2 octobre, en fin d’après-midi. Une étape est franchie pour l’équipe de candidature. « Nous sommes ravis, tout s’est très bien passé », a confié Tony Estanguet. Ouf.