Thomas Bach s’en serait volontiers passé, mais la question le suit désormais comme une ombre à chacun de ses déplacements. L’eSport fera-t-il un jour prochain ses débuts dans le programme olympique? Présent en Chine, en fin de semaine passée, le président du CIO n’a pas refusé l’obstacle. Il a répondu. Et même, surprise, il est entré dans les détails.
Interrogé par le South China Morning Post, Thomas Bach n’a pas fermé la porte. Mais il a posé ses conditions. En clair, ok pour envisager l’entrée aux Jeux des sports électroniques, mais sous réserve qu’ils respectent les règles, et plus encore les valeurs, du mouvement olympique.
« Nous voulons promouvoir la paix entre les peuples, la non-violence et la fin des discriminations, a expliqué Thomas Bach au quotidien chinois. Cela me semble incompatible avec les jeux vidéo, qui ne sont que violence, explosions et destructions. Nous devons marquer une ligne très claire. »
Le message est limpide: pas question d’accepter aux Jeux un sport électronique qui n’aurait de sport que le nom. Pour entrer dans la place, l’eSport devra faire le tri. Il devra recaler ses versions les plus guerrières, pour ne conserver que les disciplines proposant un reflet virtuel des épreuves déjà olympiques.
Thomas Bach précise: « Pratiquer un sport de façon virtuelle, comme le football, peut se révéler très intéressant. En espérant, bien sûr, que ces joueurs réalisent de véritables performances. Et nous serions encore plus intéressés et heureux si les fans de ces disciplines décidaient, au final, de pratiquer aussi ce sport dans la vraie vie. »
Thomas Bach ne ferme pas la porte. Le président du CIO confirme que les discussions ont débuté avec les parties prenantes de l’eSport. L’organisation olympique ne cache pas son attirance pour un secteur d’activité tourné vers la jeunesse. Mais il insiste: « Cette industrie connaît un très grand succès, mais elle ne s’est pas encore dotée d’une véritable organisation. Nous avons besoin de pouvoir discuter avec un interlocuteur qui nous assure que les compétiteurs ne se dopent pas, qu’ils obéissent à un règlement technique, et qu’ils se respectent les uns les autres. »
Pour Thomas Bach, les sports électroniques devront s’imprégner des valeurs de l’olympisme avant de frapper à la porte des Jeux. Il leur faudra démontrer aux membres du CIO leur universalité, mais aussi leur mixité et leur présence dans les pays moins développés. Pas simple.
Hasard ou pas, Thomas Bach a détaillé la feuille de route d’une possible intrusion de l’eSport dans le monde olympique à l’occasion d’une visite à Hangzhou, au nord de la Chine, où est installé le siège d’Alibala, le géant du commerce en ligne, nouveau partenaire du CIO. Le président du CIO a été reçu par Jack Ma, le fondateur et président du groupe chinois (photo ci-dessus).
Les deux hommes ont-ils évoqué l’avenir olympique de l’eSport? Pas sûr. Mais en parlant jeunesse et technologie, ils se sont approchés de très près du sujet. Pour preuve cette explication de Jack Ma: « Connecter les Jeux avec Internet pour attirer la jeune génération, voilà ce que peut réussir notre technologie. »
Pour rappel, le groupe Alibaba a rejoint le CIO en janvier dernier, comme membre du programme TOP, devenant partenaire officiel pour les services de « cloud computing » et de commerce en ligne. Les deux parties ont signé un contrat jusqu’en 2028.
« Alibaba est un partenaire qui partage notre vision de rendre la vie de tous plus heureuse et plus saine, dans notre cas à travers le sport, dans celui d’Alibaba grâce à la technologie, a suggéré Thomas Bach vendredi à Hangzhou. En collaborant étroitement, dans le sport et avec l’appui de la technologie, alors nous pourrons réaliser notre rêve commun. »
Selon le site du CIO, la rencontre entre les deux hommes a été suivie d’une séance de questions-réponses au siège d’Alibaba, retransmise en direct sur le web. Pour l’occasion, Alibaba a lancé sur sa plateforme d’achat TMall une promotion olympique. Elle aurait attiré… 300 millions d’utilisateurs!