La France n’a pas seulement décroché l’accueil à Paris des Jeux d’été en 2024. A Lima, la semaine passée, la session du CIO a également accordé le statut de membre de l’institution olympique à Jean-Christophe Rolland, le président de la Fédération internationale d’aviron. A 49 ans, le champion olympique en deux sans barreur aux Jeux de Sydney en 2000 rejoint Guy Drut et Tony Estanguet comme troisième Français au sein de l’organisation.
Jean-Christophe Rolland a été élu haut la main, avec 74 voix (4 contre et 4 abstentions). Un plébiscite qui sera bientôt suivi d’un autre, le 2 octobre, au congrès de la FISA, où il est seul postulant à sa réélection. Il a répondu longuement aux questions de FrancsJeux.
FrancsJeux : Que représente pour vous cette élection comme membre du CIO ?
Jean-Christophe Rolland : Un très grand honneur. Je rentre dans une organisation éminente. Avoir été nominé, puis élu, représente une formidable reconnaissance de ce que j’ai apporté au mouvement olympique. J’en suis fier également, car on me fait confiance.
L’avez-vous cherché, anticipé ou préparé ?
Non. Pour certains, même la majorité, être membre du CIO correspond à une forme d’accomplissement, voire un objectif à atteindre. Ce n’est pas mon cas. Je n’y avais jamais pensé. Je le dis avec mes tripes : je ne l’ai pas cherché. Cette élection au CIO n’a jamais été un objectif personnel. Mais j’ai eu la même philosophie pour la Fédération internationale d’aviron. Je n’avais pas l’ambition d’être président. Je voulais seulement servir mon sport. Une opportunité s’est présentée et cela s’est concrétisé. Pour le CIO, il n’y a eu aucune négociation. On me l’a proposé. J’ai accepté pour défendre les valeurs que je défends.
Sans ambition personnelle, sans négociation, pourquoi avez-vous été choisi ?
Je crois que les gens m’ont vu à l’œuvre. Ils ont appris à me connaître, à voir comment je fonctionnais. J’ai eu des discussions avec Thomas Bach, des échanges très ouverts sur mes valeurs et ma vision de l’olympisme. Mas il n’y a eu aucun deal. Et le président de la FISA n’est pas, de facto, membre du CIO.
Qu’allez-vous chercher à apporter au mouvement olympique ?
Le sport m’a beaucoup apporté. Il a façonné ma vie. A un moment, je me suis dit qu’il était temps de renvoyer l’ascenseur en donnant de mon temps et de mon énergie. Mais j’ai toujours fonctionné ainsi, depuis le tout début, dès mon élection à la commission des athlètes de la FISA. Après, il faut apprendre, gagner en expérience, essayer de connaître. Mais j’en ai l’habitude. Tout ce que j’ai obtenu, je le dois au travail. Je n’étais pas talentueux. Je suis devenu champion olympique parce que j’ai travaillé pour. Je suis devenu ingénieur parce que j’ai travaillé pour. C’est ma marque de fabrique. Aujourd’hui, je continue.
Vous arrivez à un moment difficile, avec une institution secouée par les affaires de corruption…
C’est vrai. Les gens adorent le sport, ils adorent les Jeux olympiques, mais ils n’aiment pas dirigeants. Est-ce qu’il faut laisser tomber et se résigner ? Non. L’image du CIO et des organisations sportives est à reconstruire. C’est un immense chantier.
Vous êtes jeune, avec une bonne image, issu d’un sport sain… Votre arrivée s’explique-t-elle par la nécessité de redonner du crédit au CIO et à ses membres ?
Ce n’est pas à moi de répondre. J’espère que non. Dans un environnement difficile, je crois avoir prouvé que je pouvais faire avancer les choses et contribuer au développement du mouvement sportif. Pour mes premiers Jeux olympiques comme président de la FISA, l’an passé à Rio, nous sommes allés trois fois devant le TAS avant l’événement et deux sessions ont été annulées à cause du mauvais temps !
Que peut apporter à l’aviron et à la FISA votre présence au CIO ?
Je ne suis pas le seul membre du CIO issu de l’aviron. Nous sommes six. Mais cela reste très important. L’aviron demeure, entre guillemets, un petit sport. Pour nous, être aux Jeux est vital. En étant membre du CIO, j’espère pouvoir continuer à expliquer et faire passer des messages.
Cette nomination au CIO, dans le collège des fédérations internationales, peut-elle influencer votre destinée à la FISA ? Pourriez-vous être tenté de prolonger votre mandat de président pour garder votre statut de membre ?
La question n’est pas évidente. Mais une chose est sûre : je n’ai pas de plan de carrière. Je suis là pour donner. Je donnerai tant que je le pourrai. Si un jour la communauté de l’aviron pense que je ne suis plus la bonne personne pour la représenter, j’écrirai d’autres pages dans mon livre de vie. Je ne m’accrocherai pas. Je suis incapable aujourd’hui dire combien de temps je resterai président de la FISA. Mais je vais très probablement être réélu pour un deuxième, le 2 octobre, lors du prochain congrès organisé après les championnats du monde à Sarasota. Je suis le seul candidat.