Le calme semblait revenu et les hostilités étouffées. Pour peu de temps. Le CIO et les Etats-Unis ont repris les armes, jeudi 26 juillet, s’affrontant à distance sur deux terrains explosifs : la lutte contre le dopage et la Corée du Nord.
Premier acte : le dopage. Mercredi 25 juillet, le Congrès américain a été le théâtre d’une séance d’auditions de la commission Helsinki, organisée à Washington. Au centre des débats, un projet de loi sur la lutte antidopage visant à punir les tricheurs d’une série de sanctions pouvant aller de simples amendes (jusqu’à 250.000 dollars) à des peines de prison d’un maximum de 5 ans.
En soi, rien de très révolutionnaire. Mais la loi en question, appelée à prendre le nom de Grigory Rodchenkov, l’ancien directeur du laboratoire antidopage de Moscou, ne se limite pas aux seuls Américains. Elle prévoit de permettre aux États-Unis de poursuivre les actes de dopage constatés également hors de leurs frontières. Elle concernerait les athlètes, américains et étrangers, engagés dans les compétitions rassemblant au moins quatre athlètes américains et des représentants d’au moins trois pays étrangers.
En clair, elle viserait la quasi totalité des événements du calendrier sportif international. Et, surtout, permettrait aux Etats-Unis de s’instituer en gendarme mondial de la lutte antidopage.
A Lausanne, le CIO n’a pas apprécié. Il n’a pas non plus trouvé à son goût les paroles de Travis Tygart, le directeur de l’agence américaine antidopage (USADA), à l’occasion de son audition devant la Chambre des représentants. Très virulent à l’égard de l’institution olympique, il a critiqué son immobilisme face au dopage en Russie et son peu d’empressement à protéger les athlètes propres.
La réaction du CIO n’a pas tardé. Elle a pris la forme d’un communiqué publié jeudi 26 juillet, au lendemain des auditions devant la commission Helsinki à Washington.
« Nous apprécions et saluons les démarches menées aux Etats-Unis pour intensifier la lutte contre le dopage, et nous supposons que les préoccupations très inquiétantes sur la situation actuelle de certaines ligues professionnelles aux Etats-Unis seront traitées de toute urgence. Cela a encore été révélé avec une grande évidence dans le dernier rapport de l’USADA, où est détaillé le faible niveau de tests réalisés dans ces ligues professionnelles », écrit le CIO. Une façon très diplomatique de signifier que les Américains devraient commencer par balayer devant leur porte avant de vouloir chasser les tricheurs à l’étranger.
Puis l’organisation olympique poursuit sur une note plus offensive : « Cependant, il est préoccupant de voir que la législation proposée vise à placer sous le coup de la loi américaine tous les athlètes de l’ensemble des 206 comités nationaux olympiques engagés dans des compétitions internationales. »
Enfin, le CIO hausse encore le ton en suggérant aux Américains de se joindre à l’effort collectif de lutte contre le dopage, avant de tenter de s’imposer en tête de cordée. « En ce qui concerne la lutte contre la corruption dans le sport, nous invitons le gouvernement des Etats-Unis à adhérer au « Partenariat international contre la corruption dans le sport » (IPACS), où le CIO et plusieurs gouvernements, au Japon, en Allemagne, en Grande-Bretagne, en France et en Australie, ont uni leurs forces avec des organisations internationales comme les Nations Unies, l’OCDE et le Conseil de l’Europe », conclue l’organisation olympique.
Deuxième acte : la Corée du Nord. A Lausanne, le dossier ne quitte plus le bureau de Thomas Bach. Le dirigeant allemand s’est rendu à Pyongyang en mars dernier, à l’invitation de Kim Jong-un. La question coréenne lui tient à cœur. Logique.
Seul ennui, mais de taille : la diplomatie américaine n’entend pas laisser les choses échapper à son contrôle. Selon Reuters, citant des sources diplomatiques, les Etats-Unis auraient bloqué l’envoi en Corée du Nord d’une cargaison d’équipements sportifs destinés à des athlètes nord-coréens en préparation des Jeux de Tokyo 2020.
Au début du mois de juillet, le CIO a écrit très officiellement à la commission des Nations Unies chargée des sanctions contre la Corée du Nord d’autoriser une exception pour le transport de ces équipements sportifs. Mais Reuters révèle que les Américains auraient mis leur veto à leur livraison.
La position américaine a ainsi été expliquée par l’un de ses officiels : « Nous restons optimistes quant aux perspectives de dénucléarisation de la Corée du Nord, mais il sera nécessaire d’appliquer pleinement les sanctions prévues pour y parvenir. » Pas question, donc, de laisser le CIO tracer sa route dans son coin. L’organisation olympique n’a pas encore répondu. A suivre.