Evoluez ! Changez vos habitudes ! Vivez avec votre époque ! Tel est, en substance, le message délivré par l’Association des fédérations internationales olympiques d’été, l’ASOIF, à tous ses membres. Il se veut sans nuance. Energique et radical.
D’une nature plutôt discrète, l’ASOIF sort de sa réserve. A l’initiative de son président, l’Italien Francesco Ricci Bitti, ex patron du tennis mondial, elle a planché pendant 12 mois sur l’état du mouvement olympique et sur ses perspectives d’avenir. Une année entière à multiplier les échanges et les interviews avec des acteurs du mouvement sportif, du monde économique et des pouvoirs publics.
Le résultat tient tout entier dans un rapport de plus de 40 pages, publié jeudi 28 février. Son titre en dit long sur son contenu : « L’avenir du sport global ». Un voyage dans le futur où l’ASOIF embarque les fédérations internationales avec la volonté de leur montrer la voie à suivre.
Le constat se révèle sans réelle surprise. L’ASOIF suggère que le mouvement sportif a pris de plein fouet, depuis plusieurs années, les évolutions d’un monde en forte croissance démographique, plus urbanisé que jamais, où la crise économique frappe à la porte de nombreux pays. Un monde où les athlètes et les partenaires privés revendiquent une plus grande place dans le pouvoir de décision. Un monde, enfin, où le numérique impose sa loi.
Jusque-là, rien de très nouveau. Mais Francesco Ricci Bitti l’a expliqué jeudi après la publication du rapport : « Les résultats de notre enquête peuvent aider les fédérations internationales à mieux comprendre, anticiper et réagir aux changements et aux tendances auxquels elles sont confrontées. »
Comment ? L’ASOIF ne manque pas de réponses. Son rapport liste une longue série de recommandations à l’usage de ses membres. Elles sont censées les aider à ne pas rater le train du progrès. Et, plus encore, à ne pas se laisser déborder par une évolution du sport où les athlètes sont de plus en plus nombreux à vouloir s’émanciper des institutions.
En début de semaine, les Allemands ont marqué un premier point face au CIO, en obtenant un assouplissement de la règle 40.3 de la charte olympique. Avant eux, les nageurs avaient fait plier leur fédération internationale, la FINA, l’obligeant à revoir son calendrier et augmenter ses primes sous la menace d’un circuit concurrent.
En tête de liste, parmi les lignes à cocher par tout président de fédération internationale digne de ce nom, la gouvernance. L’ASOIF la veut « d’un niveau exemplaire », et cela à tous les étages de la pyramide. Le seul moyen, à ses yeux, de maintenir, voire de restaurer, la confiance de toutes les parties prenantes.
Autre priorité : le business. Pour l’essentiel, les fédérations internationales savent faire. Mais elles fonctionnent souvent à l’ancienne. L’ASOIF leur recommande de se montrer plus « pro-actives » et créative dans leur stratégie commerciale, en développant une nouvelle approche de leurs relations avec le secteur privé. En clair, d’aller chercher les contrats sans attendre que les marques frappent à leur porte.
Moins attendu : l’ASOIF conseille fortement à ses membres de ne plus considérer les athlètes comme des acteurs sans droit à la parole. Dans un monde où les plus médiatisés d’entre eux affichent un plus grand nombre de suiveurs que leurs propres institutions, il est temps de leur proposer une plus épaisse part du gâteau.
Le moment est venu, également, de ne plus regarder les organisations privées comme un bataillon d’ennemis à éradiquer par tous les moyens. L’exemple récent de la FINA et de son conflit avec l’International Swimming League doit agir comme un signal d’alarme. Andrew Ryan, le directeur exécutif de l’ASOIF, insiste : « Il n’est plus possible aujourd’hui pour les fédérations internationales de fonctionner comme si elles étaient en situation de monopole. Elles doivent collaborer avec les entités privées et les gouvernements. »
Enfin, signe des temps : le digital. Dans les conclusions de son rapport, l’ASOIF ne cite pas directement le sport électronique. Mais il se devine entre les lignes. « Afin d’attirer de nouveaux pratiquants, les fédérations internationales doivent adapter leur stratégie à une société en mutation et à la manière dont, à l’avenir, les gens découvriront et consommeront les contenus », écrit-elle.
Une façon très alambiquée d’expliquer qu’il ne sera plus possible, désormais, aux fédérations internationales d’ignorer les sports électroniques. La révolution est en marche.