Il fallait oser. Elle a osé. Roxana Maracineanu, la ministre française des Sports, a ouvert la porte à une légalisation de la pratique du MMA.
Ses prédécesseurs ne s’y étaient pas risqués, tout en reconnaissant parfois, sur le ton de la confidence, trouver une justification à en finir de la clandestinité de la pratique. L’ancienne nageuse se montre plus courageuse. Elle se dit déterminée à renvoyer aux oubliettes un arrêté ministériel du 3 octobre 2016 interdisant les compétitions des martiaux mixtes sur le sol français.
Roxana Maracineanu a profité d’une intervention dans l’émission matinale de la chaîne RMC Sport, mardi 2 avril, pour lâcher cette bombe. « Aujourd’hui, on a ce sport très pratiqué en France, mais pas reconnu, a-t-elle expliqué. Il y a donc le danger que des éducateurs interviennent sans diplôme, et il y a aussi le danger que cette pratique se déroule dans des lieux avec des personnes pas très bien intentionnées. Je pense à l’aspect radicalisation dans le sport ou par le sport. Pour cela, nous avons envie de réglementer pour pouvoir avoir un œil sur cette discipline, sur ce sport assez complet. »
A l’évidence, la position de Roxana Maracineanu sur le MMA repose sur une connaissance assez fine du sujet. La ministre l’a reconnu, elle a creusé le dossier, jusqu’à se rendre dans des lieux de pratique.
« Je suis allée voir comment on l’enseigne, et c’est un sport qui regroupe toutes les techniques du combat, a poursuivi la ministre des Sports. Certes, au niveau professionnel il renvoie une image qui pourrait apparaître comme dégradante, parce qu’il y a une cage en fer et des coups donnés au sol. Mais il y a sûrement un aménagement à faire pour que ce ne soit plus une cage qui retienne les combattants sur le ring comme des animaux. »
Mieux : Roxana Maracineanu assure avoir déjà avancé quelques pions dans le processus de réglementation de la discipline. Une étude a été menée. Elle devrait conduire à la création d’une fédération française de MMA. Elle existe déjà, mais sans reconnaissance officielle. La nouvelle entité sera placée dans un premier temps sous la tutelle d’une fédération d’un sport de combat déjà existante.
L’option du judo est exclue. Son président, Jean-Luc Rougé, se pose depuis longtemps en principal opposant au développement en France du MMA. La discipline lui prend des licenciés.
La Fédération française de lutte (FFL) constitue une autre option, plus réaliste. La Fédération française de kickboxing, muay thaï et disciplines associées (FFKMDA) est également envisagée. « Nous avons lancé un appel à manifestation d’intérêt, à travers lequel les autres fédérations vont pouvoir se déclarer candidates pour l’accueillir », a expliqué Roxana Maracineanu sur RMC Sport.
La suite pourrait emprunter une route connue. Une fois créée et placée sous tutelle, l’institution en charge du MMA devra lancer un plan de formation d’instructeurs diplômés. Une première édition des championnats de France pourrait être organisée dès le mois de septembre 2019.
Pour la Fédération internationale, l’IMMAF, les déclarations de Roxana Maracineanu sonnent comme une forme de délivrance. La France compte parmi les derniers pays à fermer ses frontières à la discipline. Kerrith Brown, son président, a expliqué à FrancsJeux en mai dernier avoir entamé des démarches avec Laura Flessel, l’ancienne ministre française des Sports. L’accueil avait été favorable. Mais il n’avait pas été suivi d’effet.
L’IMMAF ne s’en cache pas : elle ambitionne de rejoindre le programme olympique comme sport additionnel aux Jeux de Los Angeles en 2028. Pour cela, il lui faudra d’abord obtenir la reconnaissance du CIO. Une étape obligatoire, mais encore reportée l’an passé par le refus de GAISF, l’association des fédérations sportives internationales, de reconnaître l’IMMAF.
Une légalisation de la pratique du MMA en France ne suffirait sans doute pas à faire sauter tous les verrous. Mais elle pourrait en fissurer certains.