Les grandes manœuvres n’ont pas encore débuté pour Paris 2024. Au COJO, l’heure est au recrutement, à la planification et à la recherche de partenaires privés.
A la Mairie de Paris, en revanche, on se penche déjà sur l’héritage des Jeux d’été. La capitale française doit annoncer dans les prochaines semaines ses objectifs en la matière. Ils s’annoncent ambitieux.
Pierre Rabadan, le conseiller Sport, Jeux olympiques et paralympiques au cabinet d’Anne Hidalgo, a participé en mars dernier à une conférence sur l’impact des Jeux de 2024 organisée par Sport et Citoyenneté et Audencia Business School. Il a répondu aux questions de FrancsJeux.
FrancsJeux : Paris 2024 propose un projet au coût réduit, sans nouvelles constructions dans Paris, marqué par la volonté de privilégier des sites existants ou temporaires. Avec un tel dispositif, comment assurer malgré tout un héritage durable des Jeux dans la capitale ?
Pierre Rabadan : Il n’est pas tout à fait exact de dire qu’il n’y aura pas de nouvelles constructions. Avec les Jeux, Paris va se doter d’une nouvelle Arena, Porte de la Chapelle, le seul équipement pérenne dans Paris intra-muros. Par ailleurs, trois sites d’entraînement vont bénéficier d’un programme de rénovation : les centres sportifs Max Rousié dans le 17ème arrondissement, Dauvin et Poissonniers dans le 18ème, et la piscine Georges Vallerey dans le 20ème. La candidature de Paris 2024 a été pensée avec un projet raisonnable, conforme à l’Agenda 2020 du CIO. Cette volonté était partagée par Paris et par les autres collectivités concernées, notamment la Seine Saint Denis, qui en profitera grandement avec la construction du village des athlètes, de la piscine olympique et du centre des médias. Le département a besoin d’une vraie transformation, territoriale et structurelle. Pour présenter une candidature plus sobre que par le passé, nous nous sommes appliqués à voir si les sites à construire auraient une nécessité après l’événement. C’est le cas. Je crois que tout le monde en est très fier.
Paris figure déjà régulièrement dans les classements comme l’une des plus villes les plus sportives au monde. Dans quels domaines les Jeux de 2024 peuvent-ils la faire progresser ?
Nous souffrons à Paris d’un manque d’espace. Nous n’avons pas suffisamment de terrains de grands jeux, et même d’infrastructures sportives dédiées, car la ville est extrêmement dense. De nouveaux sports et d’autres formes de pratique se développent. Nous essayons aujourd’hui de nous adapter le mieux possible aux contraintes du territoire et à la demande forte des habitants, en inventant de nouvelles solutions. On développe de nouveaux lieux de pratique, pour libérer des créneaux dans les gymnases. On rationalise autant que possible l’utilisation des terrains de grands jeux en cherchant des solutions avec les communes avoisinantes. On réfléchit à une dimension plus métropolitaine de la pratique sportive, avec nos parcs interdépartementaux en dehors de Paris, qui offrent de nouveaux terrains de jeux. Au cours de l’actuelle mandature, nous insistons également sur la rénovation des équipements sportifs, comme les piscines. Paris, ville sportive, s’appuie aussi beaucoup sur les clubs. Les Jeux de 2024 devraient permettre d’impulser une dynamique positive. Un vrai défi est à relever. Il faudra être capable d’y répondre avec ces contraintes-là.
Les cinq années avant les Jeux olympiques et paralympiques suffiront-elles à rattraper le retard pris en termes d’accessibilité, notamment dans les transports publics ?
Le transport public est une compétence de la région. Mais la ville de Paris finance et participe pour une grande partie à Ile de France Mobilité. Nous y réfléchissons tous ensemble, car ce défi de l’accessibilité dans les transports va bien au-delà des Jeux : il tient à notre capacité à proposer une offre de transports importante et accessible à tous. Le réseau de bus l’est déjà. Dans le cas du métro, beaucoup plus ancien, nous n’en sommes pas encore là. Dans Paris intra-muros, je ne pense pas qu’il soit possible en cinq ans de rénover toutes les stations, même avec tous les moyens pour le faire. Les nouvelles stations construites par la société du Grand Paris autour de la ville seront toutes accessibles. Les nouvelles gares, à l’image de ce qui a été fait sur la ligne 14 et les prolongements des lignes 15, 16 et 17, le seront également. Mais les Jeux de 2024 vont permettre de travailler sur la mobilité. L’accessibilité aux différents sites des Jeux laissera un héritage. Les voies olympiques, par exemple, qui pourront servir de voies dédiées aux véhicules propres. Développement de la voiture autonome, des mobilités douces et véhicules non polluants… Nous travaillons à tout cela. Il s’agit d’un enjeu très fort de l’héritage des Jeux : comment adapter la ville et utiliser l’événement pour développer les transports et les rendre accessibles.
S’il ne devait y en avoir qu’un seul, quel serait le plus bel héritage que les Jeux de 2024 pourraient laisser dans Paris ?
Il est très difficile de n’en choisir qu’un. la ville de Paris n’est pas seule concernée, la candidature a été pensée en adéquation avec les territoires voisins. Eux aussi vont bénéficier des Jeux, notamment la Seine Saint Denis. Surtout, notre ambition est bien plus importante. La question du déplacement dans la ville est un enjeu très important, celle de la baignade dans la Seine en est un autre. Nous voulons profiter de l’accélérateur des politiques publiques que représentent les Jeux de 2024 pour atteindre cet objectif de requalification de la Seine, la rendre à nouveau propre à la baignade et permettre à la population de se réapproprier cet espace. Et puis, nous n’oublions pas les enjeux sportifs : l’accès à l’activité physique des enfants, des seniors, de tous ceux qui en sont éloignés. Nos objectifs en termes d’héritage sont très nombreux.