Les faits remontent loin, mais ils pèsent encore lourd, assez pour bousculer certains mastodontes du mouvement olympique. Au Brésil, l’ancien gouverneur de Rio de Janeiro, Sergio Cabral (photo ci-dessus), a assuré devant la justice avoir soudoyé plusieurs membres du CIO, pas moins de 9, pour l’attribution des Jeux d’été en 2016.
Selon la presse brésilienne, Sergio Cabral a lâché deux noms : l’Ukrainien Sergueï Bubka et le Russe Aleksandr Popov. Deux poids lourds. Deux légendes.
L’ex élu brésilien, arrêté en novembre 2016 puis inculpé pour des faits de corruption et emprisonné depuis près de 3 ans, n’a pas été avare de détails. Il a expliqué que l’achat des voix, d’un montant de 2 millions de dollars, avait été arrangé avec l’aide de l’inévitable Lamine Diack, l’ancien président de l’IAAF, dont le nom revient comme un refrain dans presque toutes les affaires de corruption depuis 4 ans.
Devant le juge, Sergio Cabral a raconté que Carlos Nuzman, l’ex président du comité olympique brésilien, lui aussi poursuivi pour corruption, lui avait dit : « Le président de la Fédération internationale d’athlétisme, Lamine Diack, est ouvert aux avantages indus. Il peut nous assurer 5 ou 6 voix. Mais il veut 1,5 million de dollars. »
Toujours selon l’ex gouverneur de Rio, l’argent aurait été apporté par un entrepreneur brésilien, Arthur Soares, puis il aurait transité par les poches d’un autre habitué du genre, Papa Massata Diack, le fils de Lamine Diack. Le Sénégalais aurait ensuite utilisé les 2 millions de dollars mentionnés par Sergio Cabral pour arroser certains votants. Pour rappel, Rio de Janeiro a été désignée ville-hôte des Jeux de 2016 par la session du CIO en septembre 2009 à Copenhague. Elle a été préférée à Tokyo, Madrid et Chicago.
Lancé comme un obus, Sergio Cabral a même assuré devant le juge que l’ancien président brésilien, Lula, et l’ex maire de Rio, Eduardo Paes, étaient l’un comme l’autre au courant de la transaction. Mais ils n’y ont pas participé.
Les révélations de Sergio Cabral sont-elles crédibles ? L’ex gouverneur a-t-il dit la vérité, ou cherche-t-il seulement à lâcher des noms et des faits en échange d’une réduction de peine ? A ce stade, les deux options sont ouvertes. Mais, sans grande surprise, les individus cités nient tous en bloc.
Les avocats de Lula et d’Eduardo Paes ont assuré dès les révélations de la presse brésilienne que leurs clients n’étaient en aucun cas au courant du stratagème.
Papa Massata Diack a lui aussi déjà nié les accusations. Il jure n’avoir jamais rencontré Sergio Cabral ou Eduardo Paes. Et, s’il reconnaît avoir reçu de Carlos Nuzman la somme de 1,5 million de dollars, le Sénégalais explique que l’argent devait servir à l’organisation d’un événement sportif, finalement annulé.
Aleksandr Popov, l’ex nageur russe, quadruple médaillé d’or olympique et ancien membre du CIO (il en est aujourd’hui membre honoraire), a juré ses grands dieux n’avoir reçu aucun pot-de-vin en échange de sa voix pour Rio 2016.
« Je peux dire que je n’ai même pas voté pour Rio de Janeiro, a-t-il déclaré à l’agence russe R-Sport. J’ai participé au vote, mais ma voix n’est pas allée à Rio de Janeiro. Maintenant, je ne sais pas ce que je dois faire. Je suis désemparé et je ne comprends pas ce qui se passe autour de Rio de Janeiro. Quelqu’un ment à quelqu’un, c’est très sérieux. »