Mauvais timing ? Possible. A Doha, aux Mondiaux d’athlétisme, la première médaille d’or sera décernée au terme de l’une des épreuves annoncées les plus risquées. Le marathon féminin. Son départ sera donné une minute avant minuit, en heure locale, ce vendredi 27 septembre. La température devrait dépasser de peu la ligne des 30°. Le taux d’humidité sera proche de 60%. Ressenti : 35°.
Le marathon féminin donnera le ton. A coup sûr. En cas d’hécatombe parmi les engagées, la polémique sur les conditions climatiques dans la capitale du Qatar enflera comme un ballon gonflé à l’hélium. A 24 heures du 50 km marche, prévu dans la nuit de samedi à dimanche, la chaleur et ses risques pour la santé des athlètes feront oublier tout le reste. Dans le cas contraire, le sujet n’intéressera rapidement plus grand-monde.
Sebastian Coe le sait. Présent jeudi en fin de journée au stade Khalifa, en conférence de presse, le président de l’IAAF n’a pas éludé les questions sur le thermomètre. Il y a répondu avec des manières de connaisseur. « Le problème n’est pas la chaleur, a expliqué le Britannique. Le vrai problème, c’est l’humidité. Tous les gens qui ont déjà couru savent qu’il est possible de gérer la chaleur. L’humidité, en revanche, représente un tout autre challenge. »
Sebastian Coe l’a répété : il n’est pas question d’annuler le marathon féminin. La course aura lieu. Mais elle sera enveloppée d’une couverture de précautions encore jamais déployée dans une grande compétition internationale. « Nous mettrons plus d’eau à la disposition des athlètes, a-t-il expliqué. Nous aurons un contrôle médical plus important. Malgré tout, la course sera très difficile. »
Pour Sebastian Coe, l’expérience des Mondiaux de Doha peut servir la cause de l’IAAF aux Jeux de Tokyo 2020. Le Britannique le sait : les conditions de compétition s’annoncent aussi délicates pour les épreuves hors stade, l’an prochain au Japon, au début du mois d’août.
A Doha, l’équipe médicale de l’IAAF analysera la réaction des athlètes pour mieux les préparer aux épreuves olympiques. Une gélule leur sera proposée, sur la base du volontariat. Elle sera équipée d’une micro puce informatique, sans danger pour l’organisme. « Cela pourra nous permettre de surveiller la façon dont les athlètes réagissent à la chaleur et l’humidité, a précisé Sebastian Coe. Les résultats de cette expérience pourraient se révéler très utiles pour mieux comprendre les réactions du corps humain à ces conditions, dans la perspectives des prochaines grandes compétitions. Avec un tel outil, nous serons capables d’adapter notre sport aux conditions de défis climatiques. »
Dans le stade, en revanche, le sujet n’est pas d’actualité. Le Khalifa stadium a été équipé depuis le printemps dernier par un système inédit de climatisation (photo ci-dessus). Il permet de réguler la température, pour la maintenir à un niveau compris entre 23 et 25°.
Aux Mondiaux de Doha, les athlètes s’échaufferont sur un terrain non climatisé. Mais ils emprunteront ensuite un tunnel de refroidissement d’environ 150 m, avant d’entrer dans l’enceinte de compétition. Ce « voyage thermique », inédit dans l’histoire de l’athlétisme, leur permettra d’éviter un passage trop brutal du chaud au froid. Il permettra d’abaisser par étapes leur température corporelle.
Sebastian Coe insiste : le procédé a été testé à deux reprises, depuis sa mise en service au printemps dernier. Une première fois aux championnats d’Asie d’athlétisme, organisés du 21 au 24 avril 2019. Puis une seconde, en présence du président de l’IAAF, lors du meeting de Doha, première étape de la Ligue de Diamant, disputé le 3 mai 2019. Dans les deux cas, les athlètes l’ont qualifié d’exceptionnel.
A en croire Sebastian Coe, le procédé pourrait rapidement s’exporter. « Il intéresse beaucoup de gens, a assuré le dirigeant britannique en conférence de presse. Il pourrait même devenir rapidement un excellent produit d’exportation. »