Paradoxe. Au moment où le CIO profite depuis le début du dernier été de ses nouveaux locaux, à Lausanne, l’organisation olympique voit tout un mur de son histoire s’effriter et menacer de tomber en morceaux. Un mur sur lequel repose l’un de ses plus vieux principes.
Après l’Allemagne et l’Australie, un troisième pays a décidé d’envoyer dans les oubliettes de l’histoire la sacro-sainte règle 40 de la charte olympique. Depuis mardi 8 octobre, les Etats-Unis se sont joints au mouvement. Tout sauf une surprise.
Pour rappel, la règle 40 du CIO réserve aux seuls partenaires officiels des Jeux olympiques, dont les membres du programme mondial de marketing TOP, l’usage des anneaux olympiques. Elle interdit aux athlètes de commercialiser leurs performances et leur image pendant la période des Jeux.
En début d’année, une agence fédérale allemande a estimé que la règle en question était contraire aux lois du pays régissant la concurrence. Elle l’a jugée irrecevable. Et, par extension, autorisé les athlètes allemands à ne plus la respecter, dès les Jeux de Tokyo 2020.
L’Allemagne a ouvert une porte. Depuis, l’Australie s’y est engouffrée. Les Etats-Unis suivent à leur tour.
Le comité olympique et paralympique américain (USOPC) a annoncé mardi par la voix de sa directrice générale, Sarah Hirshland, que la règle 40 ne s’appliquerait plus aux athlètes olympiques et paralympiques portant le maillot des Etats-Unis, à partir des Jeux de Tokyo 2020.
« Nous avons fait en sorte de mettre en place une ligne directrice qui permette aux athlètes d’exploiter leurs performances sur le plan marketing, mais dans le respect de la règle 40, pour ne pas défavoriser nos partenaires et mettre en danger nos sources de financement », a expliqué Sarah Hirshland dans un communiqué de l’USOPC.
Dans les faits, les partenaires du CIO et des Jeux conserveront l’exploitation des anneaux olympiques. Les partenaires officiels de l’USOPC bénéficieront toujours de l’exclusivité du logo et de l’image de Team USA. Mais les athlètes américains pourront désormais citer leurs sponsors, personnels ou collectifs, et les remercier, notamment sur les réseaux sociaux. Les sponsors en question pourront, de leur côté, utiliser pendant l’événement le nom et l’image de leurs athlètes, par exemple via une campagne de publicité.
Commentaire de Han Xiao, l’ancien joueur de tennis de table, actuel président de la commission des athlètes de l’USOPC : « Cette nouvelle donne permet aux athlètes de profiter vraiment des Jeux sur le plan commercial. Elle est le signe d’un réel pas en avant. »
Allemagne, Australie et maintenant Etats-Unis. Trois des mastodontes du mouvement olympique ont envoyé valser la règle 40 de la charte olympique. Ils ne devraient pas rester seuls à avancer sur le chemin de la loi du marché.
Après la décision de la juridiction allemande, en février 2019, le CIO avait tardé à répondre. Au mois de juin, l’organisation olympique a fait savoir que l’application de la règle 40 serait désormais à traiter au cas par cas, pays par pays, par les comités nationaux olympiques. En clair, le CIO restait droit dans ses bottes, mais laissait à chacun le droit de réformer la règle, ou pas, sur son propre terrain et pour ses seuls athlètes.
A moins d’un an des Jeux de Tokyo 2020, le temps presse. Mais il serait surprenant que le groupe des dissidents à la règle 40 reste longtemps à l’état de trio. Il serait également peu cohérent, et très injuste, que les athlètes allemands, américains et australiens puissent exploiter commercialement leurs performances aux Jeux de Tokyo 2020, pendant que tous les autres restent soumis à la loi du silence.