Ses athlètes lui ont tourné le dos, son groupe d’entraînement a implosé et sa réputation sera entachée à jamais. Mais Alberto Salazar ne baisse pas les bras. Le coach américain a décidé de faire appel devant le Tribunal arbitral du sport (TAS) de sa suspension de quatre ans imposée par l’Agence américaine antidopage (USADA).
Combatif, l’ancien marathonien. Le TAS l’a annoncé lundi 11 novembre via un communiqué : Alberto Salazar et le docteur Jeffrey Brown, un endocrinologue employé par le Nike Oregon Project à Beaverton, dans l’Oregon, ont déposé un appel. Ils contestent leur suspension, révélée le 30 septembre dernier par l’USADA.
Après une enquête de 4 ans motivée par des révélations de la BBC, l’USADA avait expliqué en plein Mondiaux à Doha que le coach le plus connu du demi-fond mondial devait sa suspension à des pratiques dopantes et à la possession illégale de testostérone.
Alberto Salazar a nié les faits. Depuis, l’Américain n’a pas changé sa ligne de défense. Il est resté longtemps silencieux, se tenant prudemment à l’écart des médias. Il a préparé la contre-attaque.
Tout juste est-il sorti de son isolement, la semaine passée, pour répondre aux accusations de l’Américaine Mary Cain, une ancienne athlète du Nike Oregon Project, sur ses méthodes d’entraînement douteuses et son obsession de la perte de poids.
« Le père de Mary est médecin et ses deux parents étaient profondément impliqués dans ce qui concernait son entraînement, la compétition et sa santé durant la période où je l’ai entraînée, a écrit Alberto Salazar dans un communiqué. Par exemple, le père de Mary s’informait des médicaments et compléments que Mary prenait. Ni ses parents, ni Mary n’ont soulevé les problèmes qu’elle suggère aujourd’hui. Pour être clair, je ne l’ai jamais encouragée à se maintenir à un poids dangereux pour sa santé. »
La suite du feuilleton n’est pas pour demain. Dans son communiqué, le TAS précise que « les parties ont demandé un délai supplémentaire pour déposer leurs observations écrites et leurs preuves. » Le dossier s’annonce complexe. Alberto Salazar et Jeffrey Brown laisseront leur équipe d’avocats se mettre au travail. Selon le TAS, « il semble peu probable que les audiences aient lieu avant le mois de mars 2020. »
En attendant, Alberto Salazar est interdit d’exercer la profession d’entraîneur, aux Etats-Unis comme ailleurs. Le Nike Oregon Project a été fermé, une semaine après la fin des Mondiaux de Doha, par l’équipementier américain. Ses athlètes se tournent déjà vers d’autres structures, aux Etats-Unis pour la plupart.
A ce stade de l’affaire, il apparaît encore hasardeux de prédire l’issue de l’appel déposé devant le TAS par Alberto Salazar et Jeffrey Brown. Mais la suspension de l’ex marathonien, aujourd’hui âgé de 61 ans, a déjà fait son lot de victimes.
Neil Black, le directeur de la performance de la Fédération britannique d’athlétisme (UK Athletics), a rendu les clefs de son bureau. Il avait défendu le travail et les méthodes d’Alberto Salazar à l’époque où l’Américain s’occupait de Mo Farah et bénéficiait, à ce titre, d’un rôle de conseiller de l’équipe britannique.
Autre victime collatérale : Mark Parker. Directeur général de Nike depuis 2006, l’Américain quittera ses fonctions au début de l’année 2020. Il sera remplacé par John Donahoe.
Officiellement, le départ de Mark Parker n’a évidemment pas de lien direct avec l’affaire Salazar. Mais il a été annoncé deux semaines après la fermeture du Nike Oregon Project. Mark Parker a soutenu Alberto Salazar jusqu’au bout.
Dans un courrier adressé aux salariés du groupe pendant les Mondiaux de Doha, il expliquait que le sulfureux coach disposait du soutien de Nike. « Alberto essayait d’éviter que les athlètes soient dopés, ce qui est exactement l’opposé de ce que suggèrent les commentaires que vous avez pu entendre », a écrit le futur ex dirigeant de Nike. Osé.