Le navire serait-il en train de prendre l’eau ? Le CIO continue de souquer ferme dans la tempête, répétant que le temps n’était pas encore venu de prendre des mesures « drastiques » concernant les Jeux de Tokyo. Mais, pour la première fois, l’un de ses membres ose critiquer ouvertement sa position.
L’audacieux est canadien. Surprise, il ne s’agit pas de Dick Pound. Cette fois, la contestation est venue d’une femme, nettement plus jeune dans l’institution. Hayley Wickenheiser, quadruple championne olympique de hockey-sur-glace entre 2002 et 2014, est membre du CIO depuis 2014, au titre de la commission des athlètes.
Mardi 17 mars, elle a entendu le CIO renouveler sa confiance dans le bon déroulement des Jeux de Tokyo aux dates initiales. Mais, contrairement à l’ensemble de ses pairs, elle n’a pas gardé pour elle son agacement devant un tel discours.
« Voir le CIO insister avec une telle conviction sur le fait que les choses vont aller de l’avant est insensible et irresponsable étant donné l’état de l’humanité », a écrit l’ancienne gardienne de but canadienne sur son compte Twitter.
Puis elle a enfoncé le clou : « Cette crise est plus grande que les Jeux olympiques. Nous ne savons pas ce qui se passera dans les 24 prochaines heures, encore moins dans trois mois. Les Jeux olympiques devraient-ils être annulés ? Personne ne le sait à ce stade et c’est MON point de vue. Mais dire avec certitude qu’ils iront de l’avant est une injustice pour les athlètes qui s’entraînent et la population mondiale en général. »
Plus tôt dans la journée, mardi 17 mars, le CIO a enchaîné deux réunions par vidéoconférence. La première, en cercle réduit, a rassemblé les membres de la commission exécutive. La seconde, plus large, a concerné les représentants des fédérations internationales des sports olympiques d’été. Dans les deux cas, un seul sujet : l’épidémie de COVID-19 et ses conséquences sur les Jeux de Tokyo 2020.
Le deuxième échange, le plus attendu, a duré deux heures. Les présidents des fédérations internationales ont pu poser leurs questions, principalement sur les procédures à envisager pour les qualifications aux Jeux de 2020.
Au terme de la réunion, le CIO s’est fendu d’un communiqué très développé. Selon la version officielle, il a été approuvé à l’unanimité par toutes les parties concernées. L’unité, donc, encore et toujours. Au moins en façade.
Passons rapidement sur les formules d’usage, vues et entendues depuis plusieurs semaines. Le CIO répète sa détermination à « agir comme une organisation responsable. » Il demande à tous ses partenaires « de tout faire pour contribuer à endiguer le virus. »
L’essentiel est ailleurs. « A un peu plus de quatre mois de l’ouverture des Jeux, il n’est pas nécessaire de prendre de décisions radicales et toute spéculation à ce stade serait contre-productive », assure le communiqué du CIO. L’institution insiste : « Le CIO est confiant que les nombreuses mesures prises par les autorités dans le monde entier aideront à contenir la situation quant au virus du Covid-19. »
Patience, confiance. Le refrain est connu. L’organisation olympique le répète depuis plusieurs semaines. Mais à moins de 130 jours des Jeux, il passe de plus en plus mal.
Certes, Hayley Wickenheiser est la seule membre du CIO qui ait osé exprimer publiquement sa défiance à l’égard de la position officielle de l’institution. Mais les athlètes sont de plus en plus nombreux à critiquer l’attentisme des dirigeants olympiques, voire à appeler à un report de l’événement.
Mardi 17 mars, le CIO a expliqué aux fédérations internationales sa position sur les qualifications olympiques. Dans son communiqué, il précise que « 57 % des athlètes sont déjà qualifiés pour les Jeux. Pour les 43 % de places restantes, le CIO travaillera avec les FI afin d’apporter les modifications pratiques nécessaires à leurs systèmes de qualification respectifs conformément aux principes suivants :
1. Toutes les places de qualification déjà attribuées à ce jour restent allouées aux CNO et aux athlètes qui les ont obtenues.
2. Il est toujours possible d’utiliser les épreuves de qualification existantes et programmées lorsque celles-ci assurent un accès équitable à tous les athlètes et équipes.
3. Toutes les adaptations nécessaires aux systèmes de qualification et toutes les attributions de places restantes :
a) seront basées sur les résultats réels (par ex. classement de la FI et résultats passés) ; et
b) refléteront dans la mesure du possible les principes existants des systèmes de qualification respectifs (par exemple l’utilisation des classements ou des résultats lors d’une épreuve continentale/régionale spécifique)
Une augmentation du quota d’athlètes sera envisagée au cas par cas dans des circonstances exceptionnelles, avec le concours du comité d’organisation de Tokyo 2020. »