C’est désormais quasiment officiel : les Jeux de Tokyo 2020 ne se dérouleront pas du 24 juillet au 9 août. Ils seront reportés. Reste à savoir si le report sera de trois mois, d’une année, où même d’une demie olympiade.
Face à la pression des athlètes, des fédérations nationales et des comités nationaux olympiques, le CIO a réuni en urgence sa commission exécutive, dimanche 22 mars, pour une nouvelle discussion au sommet sur la tenue des Jeux de Tokyo 2020.
Sans grande surprise, le ton a changé. L’institution olympique ne répète plus comme un refrain que les Jeux débuteront vendredi 24 juillet à Tokyo. Son communiqué, publié dimanche soir, évoque pour la première fois le report de l’événement.
La formule utilisée par le CIO se veut très ampoulée : « La santé et la sécurité étant primordiales, la commission exécutive du CIO décide d’accélérer la planification de scénarios pour Tokyo 2020. » En clair, Thomas Bach et sa garde rapprochée appuient sur l’accélérateur pour accoucher d’une décision sans attendre une sortie de la crise sanitaire. Ils se donnent un délai maximum de 4 semaines pour annoncer leur décision.
Au Japon, l’annonce du CIO semble avoir libéré la parole des autorités politiques. Le gouvernement japonais s’en tenait jusque-là aux directives de Lausanne, répétant à l’infini sa confiance dans l’organisation des Jeux en juillet et août 2020.
Lundi 23 mars, le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, a emboîté le pas de Thomas Bach et évoqué lui aussi, pour la première fois, le scénario d’un report. « S’il est difficile d’organiser les Jeux comme prévu, nous devons décider de les reporter, en donnant la priorité absolue à la santé des athlètes », a déclaré Shinzo Abe à l’occasion d’une session parlementaire.
Le Premier ministre a insisté : « Même s’il revient au CIO de prendre la décision finale, nous sommes du même avis sur le fait que l’annulation n’est pas une option. »
Yuriko Koike, la gouverneure de Tokyo, se range elle aussi désormais dans le camp du report. Elle a profité d’une conférence de presse, ce lundi 23 mars, pour confier partager le point de vue de Shinzo Abe. Mais Yuriko Koike souhaite s’entretenir très rapidement avec le CIO et le comité d’organisation des Jeux sur la question du village des athlètes et de ses futurs résidents.
A Lausanne comme à Tokyo, l’idée d’un report n’est plus évoquée au conditionnel. Elle est acquise. Mais les questions demeurent. Elles sont nombreuses.
La première concerne l’annonce de la décision. Prudent, le CIO explique vouloir se donner quatre semaines pour trancher. Selon plusieurs sources internes à l’institution, elle pourrait intervenir nettement plus tôt. La commission exécutive pourrait être à nouveau réunie dès cette semaine, voire très tôt dans la semaine, toujours par visioconférence.
Un nouvel attentisme du CIO serait très mal perçu par le mouvement olympique, notamment les athlètes et les comités nationaux olympiques. Shinzo Abe lui aussi l’a suggéré ce lundi depuis Tokyo : le plus tôt sera le mieux.
Reste l’essentiel : la nature du report. Une source interne au CIO confie que trois scénarios seraient à l’étude : les plans B, C et D. Pour chacun d’eux, la balance reste très incertaine entre le pour et le contre, l’impossible et le crédible.
La première option prévoit un report à l’automne. Les Jeux pourraient conserver leur appellation, Tokyo 2020. Ils débuteraient à la fin du mois d’octobre pour se terminer dans la première quinzaine du mois de novembre. Les règles de qualification n’auraient pas à être modifiées. Les installations sportives ne devraient pas être « gelées » trop longtemps.
Mais il faudrait aux diffuseurs, NBCUniversal en priorité, adapter leurs grilles de programme dans un automne occupé par les championnats des sports collectifs. Autre obstacle : la menace des typhons. Les Jeux paralympiques, de leur côté, seraient décalés en novembre, voire au début du mois de décembre, une période de l’année moins propice aux épreuves en plein air. Enfin, le comité d’organisation aurait sans doute à relancer un processus de vente des billets et de recrutement des volontaires, avec la perspective d’une avalanche de renoncements et de désistements.
Surtout, il est encore impossible aujourd’hui au CIO d’avoir la certitude que la pandémie de coronavirus sera contenue assez tôt pour assurer des Jeux à l’automne en totale sécurité sanitaire et équité sportive.
La deuxième option envisage un report à l’été 2021. Même période de l’année, mais douze mois plus tard. Pas simple. A Tokyo, il faudrait aux organisateurs geler les installations sportives et en assurer la maintenance, repousser d’une année la vente des appartements du village des athlètes, sans compter le surcoût de la masse salariale des employés du comité d’organisation. Par ailleurs, les Jeux de Tokyo 2021 entreraient en collision avec les Mondiaux d’athlétisme (6 au 15 août à Eugene) et de natation (16 juillet au 1er août à Fukuoka).
Le plan D ? Il imagine les Jeux de Tokyo en 2022, quelques mois après ceux d’hiver à Pékin. Le mouvement olympique reviendrait 28 ans en arrière, lorsque les deux événements étaient organisés au cours d’une même année. Peu probable mais pas exclu.