L’épidémie de COVID-19 n’a pas seulement rayé un à un tous les événements sportifs, internationaux et nationaux, sur la plus grande partie de la planète. Ses effets devraient dépasser largement la seule période du confinement. Ils pourraient même changer à tout jamais les règles et les usages du mouvement sportif.
L’agence BCW (Burson Cohn & Wolfe) Sports Practice, basée à Lausanne, a cherché à analyser les conséquences de la pandémie sur l’organisation des grands événements sportifs. Elle a interrogé en ligne les représentants d’une centaine de villes dans le monde, les plus actives en termes de candidatures et d’accueil de rendez-vous majeurs du calendrier.
Son enquête a été conduite pendant une semaine, entre le 23 et le 29 mars. Ses résultats en disent long sur les effets, à court et moyen termes, de la crise sanitaire mondiale.
Première tendance, la plus prévisible : l’argent. L’heure n’est pas encore à faire les comptes, mais l’immense majorité des villes sondées (78%) anticipe dès maintenant des pertes financières en 2020, pour l’essentiel en raison de l’annulation ou du report d’événements sportifs prévus sur leur territoire. Moins attendu : près de la moitié des métropoles interrogées (43%) s’attend à une réduction du budget pour l’organisation d’événements sportifs en 2021. Elles sont même 17% à penser que les restrictions budgétaires s’étendront au-delà de l’année prochaine.
Interrogé par BCW, le représentant d’une grande ville nord-américaine explique : « Le soutien financier des pouvoirs publics pour les événements sportifs va être très, très limité, au moins dans un avenir proche. »
Autre conclusion de l’enquête : la stratégie des grande villes mondiales en termes d’événements sportifs devrait changer radicalement dans les mois et les années à venir. La crise du COVID-19 et ses multiples effets pourraient inciter les décideurs à tourner le dos aux rendez-vous les plus massifs, donc coûteux et risqués, pour se concentrer sur des compétitions locales ou nationales. Plus d’un tiers des personnes interrogées (37%) suggèrent que leur ville accueillera probablement moins d’événements internationaux dans les années à venir.
L’évolution de la crise sanitaire pourrait encore confirmer la tendance. Elle risque même de la renforcer, avec le report et l’annulation probable de la quasi-totalité des grands événements prévus au cours des mois d’été.
Pour le CIO, notamment, la perspective de voir les grandes métropoles internationales tirer un trait sur leurs projets sportifs à grande échelle annonce une période difficile. L’Australie, où l’opposition à une candidature du Queensland aux Jeux d’été en 2032 se manifestait déjà avant le début de la pandémie, maintiendra-t-elle son projet olympique ? Le Japon, où Sapporo avait lancé sa course à l’accueil des Jeux d’hiver en 2030, voudra-t-il toujours tenter l’aventure ? Pas sûr.
Le représentant d’une ville danoise l’explique : « Il me semble que les événements ne constitueront plus un pilier majeur du développement du sport, au moins dans un avenir proche. Les décideurs voudront se concentrer sur le sport local, avec la volonté de le remettre sur ses pieds. »
L’après confinement s’annonce comme une période où les pouvoirs publics concentreront sans doute leurs efforts, mais aussi leurs moyens, au développement d’une activité physique plus basique. Le sport santé pourrait être privilégié au sport de compétition. L’animation locale sera favorisée, au détriment des rendez-vous internationaux, médiatiques mais dispendieux. Une forme de retour aux sources.