Cruel timing. Le Japon aurait dû entrer ce lundi 20 juillet dans la semaine d’ouverture des Jeux de Tokyo. Dans le « monde d’avant », l’événement devait débuter vendredi 24 juillet. A la place, la défiance du public japonais envers les Jeux ne cesse de grimper. Elle n’a même jamais été aussi élevée.
Deux sondages en disent long sur la lente glissade de l’opinion publique japonaise vers le refus des Jeux de Tokyo. Ils ont été réalisés en fin de semaine passée par les médias japonais. Paradoxe : la consultation a été menée au moment où le comité d’organisation expliquait à la session du CIO que tous les sites des Jeux étaient désormais sécurisés, y compris le village des athlètes.
Selon une enquête de l’agence Kyodo News, seulement 23,9 % des Japonais souhaitent que les Jeux se déroulent l’été prochain comme prévu. Moins d’un sondé sur 4, donc. Une proportion encore jamais révélée par une consultation publique au Japon, même au plus fort de la crise sanitaire.
Dans le détail, 36,4 % des personnes interrogées se disent en faveur d’un nouveau report, une option pourtant écartée sans ménagement par le CIO et le comité d’organisation. Elles sont 33,7 % à estimer que l’événement devrait être purement et simplement annulé.
Une autre enquête d’opinion, réalisée cette fois par le quotidien Asahi, affiche des résultats très comparables. Seulement un tiers des sondés (33 %) déclare vouloir que les Jeux de Tokyo aient lieu en 2020. Dans le camp d’en face, ils sont 61 % à confier préférer un report ou une annulation.
Logique ? Sûrement. Mais les explications avancées par les Japonais pour justifier leur défiance à l’égard des Jeux de Tokyo ont changé de registre.
Dans l’enquête menée par Kyodo News, seulement 5,9 % des personnes interrogées citent le surcoût des Jeux comme un argument en faveur de leur annulation. Les Japonais semblent s’être résignés à voir la facture de l’événement grimper encore. A défaut d’un chiffre précis sur le coût du report, attendu pour l’automne dans le meilleur des cas, ils font preuve d’une forme de fatalité.
En revanche, la perspective de voir le monde entier débarquer dans l’archipel en juillet 2021 les inquiète. On peut les comprendre. Les trois quarts des sondés (75,3 %) qui se disent en faveur d’un nouveau report ou d’une annulation estiment que la pandémie ne sera pas maîtrisée l’an prochain à la période des Jeux.
Parmi les autres arguments pour une annulation, 12,7 % des Japonais interrogés par Kyodo News suggèrent que le gouvernement de Shinzo Abe devrait plutôt se concentrer sur les mesures de réduction de la propagation du virus. Et placer loin derrière la préparation d’un événement olympique susceptible de multiplier les risques.
A la question des mesures que les organisateurs pourraient envisager pour simplifier les Jeux, 44,1 % des sondés estiment que les compétitions pourraient se dérouler sans spectateurs, ou au en nombre limité.
Autre tendance : plus d’un Japonais sur 4 (26,5 %) se déclare hostile à l’idée des autorités du pays d’assouplir les restrictions de voyage pour les athlètes étrangers, l’an prochain, même dans le scénario où la crise sanitaire ne serait pas maîtrisée.
A une année et moins d’une semaine de l’ouverture, les organisateurs n’ont pas seulement la tâche délicate de surveiller les comptes. Il leur faut aussi restaurer la confiance de l’opinion. Pas le plus simple.