Amina Lanaya
Maroc/France
Directrice générale de l’Union Cycliste Internationale (UCI)
Après des études de droit et plusieurs expériences dans des cabinets d’avocats à Paris et Lausanne, Amina Lanaya entre à l’Union Cycliste Internationale (UCI), l’instance dirigeante du cyclisme mondial, en janvier 2006 comme juriste. Elle travaille notamment sur l’antidopage. En 2013, elle change de fonction pour occuper le poste d’adjointe du Directeur Général. Quatre ans plus tard, elle franchit une étape supplémentaire pour devenir directrice générale, par intérim dans un premier temps, avant d’être confirmée à cette fonction en 2018. A 40 ans, elle dirige aujourd’hui à Aigle, en Suisse, une équipe de 120 personnes, entre la fédération internationale et le Centre Mondial du Cyclisme UCI. Mère de deux enfants, elle habite sur les bords du lac Léman, non loin des bureaux de l’UCI.
Depuis vos débuts professionnels, quelle a été l’expérience la plus marquante de votre parcours ?
Amina Lanaya : La période actuelle, marquée par le coronavirus, est unique, à tous points de vue. Elle est la plus difficile et complexe que le mouvement sportif ait connue. Elle nous marquera tous. Mais avant cela, je dirais que l’expérience la plus formatrice a été mon passage pendant sept ans au service juridique de la Fédération. J’ai appris énormément pendant cette période, qui a sans doute été l’une des plus délicates pour l’UCI. Les années Lance Armstrong. Nous avons perdu beaucoup de crédibilité, il a fallu se reconstruire. Cette expérience a fait la femme que je suis aujourd’hui. La première femme directrice générale de l’UCI. La plus jeune, également.
Comment appréhendez-vous, dans votre fonction à l’UCI, la situation économique actuelle et l’incertitude des mois à venir ?
Depuis le mois de mars dernier, je suis entrée en période de crise, avec une gestion de risque permanente. L’UCI rassemble huit disciplines sportives différentes. Nous sommes pour ainsi dire presque huit fédérations internationales sous un même toit. Mais le cyclisme sur route reste la discipline la plus visible, avec le calendrier international le plus dense. Il est aussi, via ses championnats du monde, notre principale source annuelle de revenus. L’impact de la pandémie de COVID-19 y a été le plus important. Mais, contrairement à beaucoup de fédérations internationales, nous n’avons pas annulé tout ou partie de la saison. Nous avons essayé de sauver les compétitions, avec une reprise de l’actualité dès le mois de juillet dernier. Nous n’avons jamais renoncé, et nous en avons été récompensés avec l’organisation très réussie des Mondiaux sur route UCI à Imola, en Italie. Cette crise sanitaire a révélé que nous étions capables de travailler ensemble dans le cyclisme professionnel. Elle a montré que l’UCI pouvait diriger les échanges et se faire entendre. Il nous a également fallu gérer une situation économique inédite, avec le report des Jeux de Tokyo. L’UCI reçoit tous les quatre ans plus de 25 millions de francs suisses du CIO, dont l’essentiel part au Centre Mondial du Cyclisme UCI, chargé de la formation et du développement de notre sport à travers le monde.
Comment définiriez-vous la façon dont vous exercez votre rôle de directrice générale ?
Je suis une passionnée. J’aime les gens, le dialogue et les échanges. Je veux comprendre les choses et les faire comprendre à mes collaborateurs. Je vais au bout des choses, mais en essayant de ne pas négliger l’aspect humain. Pour toutes ces raisons, j’ai été très heureuse et fière de voir que nous avions été capables de travailler ensemble, toutes les parties prenantes du cyclisme, depuis le début de la crise sanitaire. J’entretiens également une excellente relation avec mon président, David Lappartient, et mon Comité Directeur, ce qui facilite grandement mon travail à l’UCI.
Quelles sont les trois valeurs les plus importantes à vos yeux dans votre activité professionnelle ?
En premier, la passion. J’aime ce que je fais et je veux que les gens autour de moi puissent eux aussi vivre la même passion. Ensuite, l’unité. Dans le monde du vélo, il n’a pas souvent été démontré au cours des dernières décennies que les gens pouvaient travailler ensemble. Aujourd’hui, nous prouvons que l’unité est possible. Et nous allons continuer. Enfin, la loyauté. Elle est indispensable à mes yeux dans l’activité professionnelle comme dans la vie personnelle. Ce sont des valeurs que j’essaie d’inculquer tous les jours à mes enfants.