A sa façon, inédite, la cérémonie d’ouverture des Jeux de Tokyo s’annonce comme un modèle d’équilibre. Les dignitaires seront tout juste assez nombreux, une quinzaine en comptant tout le monde, pour remplir un seul bus officiel en laissant un siège vide pour un autre occupé. Les « spectateurs », officiels et médias pour l’essentiel, n’atteindront même pas le millier. Mais, bonne nouvelle, les délégations se sont accordées pour rester elles aussi dans des proportions minimalistes.
A J – 1, ce jeudi 22 juillet, les indicateurs envoyés ici et là laissent présager un défilé des nations appelé à marquer l’histoire de l’olympisme par sa durée, la longueur de sa procession et l’étroitesse des effectifs.
Le comité olympique canadien (COC) a prévenu via un communiqué : sa délégation comptera tout juste « 30 à 40 athlètes » vendredi soir au stade olympique. Pour ces Jeux de Tokyo, le pays a pourtant envoyé son équipe la plus massive depuis les Jeux de Los Angeles en 1984, avec un contingent de 370 sélectionnés. Mais le COC s’en explique avec des manières très diplomatiques : « Les athlètes n’arrivent au village que cinq jours avant leur compétition. Ils sont donc encore peu nombreux, et la plupart des présents sont sur le point d’entrer en compétition. L’objectif de l’équipe canadienne reste la sécurité, la performance et le respect des règles du jeu décidées par le comité d’organisation. » Bien dit.
Même son de cloche dans la délégation australienne. Sur le papier, elle pèse son poids, avec 470 athlètes habillés de jaune et vert, la plus forte représentation de l’histoire pour des Jeux d’été organisés à l’étranger. Mais ils seront tout juste une cinquantaine à défiler en bon ordre à la cérémonie d’ouverture. Aux présents, le chef d’équipe a recommandé de profiter du moment et d’afficher un beau sourire, malgré l’absence de spectateurs dans les tribunes du stade.
La Suisse, plus modeste dans ses dimensions, présentera une vingtaine d’athlètes, selon son comité national olympique. Certains pays aux effectifs très réduits, dont les athlètes entrent pour l’essentiel en compétition au cours de la deuxième semaine, pourraient être représentés par leurs seuls portes-drapeaux.
Cinq ans plus tôt, aux Jeux de Rio 2016, plus de 12.000 athlètes et officiels avaient défilé à la cérémonie d’ouverture. Précision : les organisateurs japonais ont imposé cette année aux pays un maximum de six « non athlètes » – dirigeants ou entraîneurs – par délégation pour le défilé des nations.
Maigrelet, donc. Mais, par la grâce d’une décision du CIO prise longtemps avant le début de la crise sanitaire, l’essentiel sera ailleurs. L’intérêt du spectacle ne sera pas dans la taille des délégations, vendredi soir, mais dans la découverte des meneurs de la troupe.
Pour imprimer la cadence, la grande majorité des pays ont suivi la recommandation de l’instance olympique de choisir deux porte-drapeaux, un homme et une femme. Mieux : ils ont été nombreux à donner à leur sélection une dimension d’égalité, de diversité ou de justice sociale.
Les Américains ont associé la basketteuse Sue Bird, quadruple championne olympique, au joueur de baseball Eddy Alvarez, issu d’une famille d’émigrés cubains. Les Australiens ont fait le choix d’une nageuse, Cate Campbell, et d’un joueur de basket, Patty Mills, premier aborigène à porter le drapeau national aux Jeux olympiques. Les Britanniques ont penché pour une spécialiste de la voile, Hannah Mills, et un rameur musulman, Mohamed Sbihi. Les Pays-Bas ont opté pour les extrêmes, avec un duo de porte-drapeaux composé du doyen de la sélection, l’athlète Churandy Martina, 36 ans, et la benjamine de l’équipe, la skateuse Keet Oldenbeuving, plus jeune de vingt ans.
Avec un tel casting, le défilé des délégations prendra une dimension plus symbolique que jamais. Il ne fera pas le nombre mais enverra un message. A l’image des Jeux de Tokyo.