Deuxième volet de l’entretien accordé à FrancsJeux par Tony Estanguet. Avec, toujours, le même fil conducteur : la fonction présidentielle. Après avoir évoqué sa vision et son apprentissage du rôle qu’il exerce au COJO Paris 2024, le triple champion olympique de canoë se projette sur la nouvelle olympiade. Il n’en fait pas mystère : le plus dur commence.
Seul aux commandes mais très entouré
« Je suis seul à la présidence, mais je n’ai jamais eu l’impression d’avancer en solo dans cette aventure. Nous avons une gouvernance très collective et très partagée. Le bureau exécutif de Paris 2024 est composé de la Ville de Paris, du département de la Seine-Saint-Denis, de la région Ile-de-France, de l’État et du mouvement sportif. Tous ces acteurs sont au cœur de la machine. Ils sont très impliqués. Toutes les décisions stratégiques sont prises et validées par l‘ensemble de ces acteurs. Il est dans l’ADN de Paris 2024 de ne jamais avancer sans eux. A mon poste, je me nourris de l’expérience de la maire de Paris, du président de la République, du Premier ministre, de la présidente de la région. Ils ont tous un domaine de compétence très fort sur lequel le COJO s’appuie. »
Un rôle présidentiel en pleine évolution
« Mon rôle à la tête du COJO ne cesse d’évoluer depuis le début de la candidature. Au début, il fallait lui donner une dimension sportive, en embarquant des athlètes. Puis je me suis tourné vers l’international, en allant rencontrer les dirigeants du mouvement olympique. Je me suis ensuite beaucoup impliqué sur la coordination des acteurs locaux. Depuis 2017 et l’attribution à Paris des Jeux en 2024, l’évolution a continué. Les premiers temps, nous nous sommes centrés sur nous. Maintenant, la priorité reste d’engager tout le monde sur la réussite du modèle. Quand je rencontre le président de la fédération internationale de voile (le Chinois Quanhai Li), je tiens ce discours : les Jeux seront spectaculaires à Marseille, mais ça n’est pas suffisant. Comment peut-on réduire ensemble le nombre de bateaux sur l’eau qui accompagnent les athlètes ? Nous évoquons ensemble la façon de conserver une compétition spectaculaire, mais en proposant un modèle plus ouvert, moins coûteux et plus engageant. Mon rôle, dans les mois et les années à venir, sera de plus en plus de faire le lien entre le travail des équipes de Paris 2024 et l’engagement et l’implication de toutes les parties prenantes. »
Président, une fonction très exposée
« Je connais l’histoire, je sais ce qui s’est passé aux précédents Jeux. J’ai pleinement conscience que le rôle de président est très exposé. C’est normal. Dans un comité d’organisation, le président du début n’est pas toujours là à la fin. Je sais aussi que la tâche qui m’attend sera encore plus difficile, même si rien n’a été simple jusque-là. Les défis vont être nombreux et difficiles. Mais je reste mobilisé sur mon objectif. Je veux réussir. Nous avons la chance d’avoir une équipe solide et un projet très fort. Il n’y a pas de raison de penser que nous n’allons pas y arriver. »
A trois ans des Jeux, le plus dur commence
« Je m’appuie beaucoup sur mon expérience d’athlète. Il y a cette montée en puissance au fur et à mesure qu’on se rapproche de l’objectif, mais chacun des moments est important. On ne peut pas remporter la victoire aux Jeux sans s’être bien entraîné, sans être prêt, sans être le plus fort à ce moment-là, mais on n’a pas gagné tant que la ligne n’est pas franchie. Tu peux être le plus fort au départ et ne pas gagner. Je ressens un peu ça aujourd’hui. Je veux qu’à chaque étape du projet on se donne les moyens d’être le plus fort possible. Il ne faut pas baisser la garde sur le niveau d’ambition. Je me bats là-dessus depuis le début : ces Jeux doivent être extraordinaires. La France est un grand pays qui peut organiser des Jeux extraordinaires, à condition de garder le niveau d’ambition qui est le nôtre depuis le début, même si c’est plus compliqué. Comme quand j’étais athlète, plus on va se rapprocher de l’objectif, plus ce sera difficile. Chaque moment devient déterminant. Mais si on ne réussit pas ce qu’on doit faire aujourd’hui, on ne réussira pas les Jeux. Il y a une forme de confiance à entretenir au quotidien. Mon objectif est que, le jour de la cérémonie d’ouverture, nous ayons le niveau de confiance qui est le nôtre aujourd’hui. »