Les Mondiaux d’athlétisme en 2023 à Budapest devront-ils changer de ville-hôte ? A moins de deux ans de l’événement, le scénario n’est pas exclu. Le maire de la capitale hongroise, Gergely Karácsony, a brandi en début de semaine la menace d’un veto à l’organisation de l’événement. Sa proposition doit être discutée ce mercredi 1er septembre lors d’un conseil municipal.
En cause, une affaire très politique. Le maire de Budapest n’en fait pas mystère : sa menace ne constitue rien d’autre qu’une riposte à la décision du gouvernement hongrois de faire construire dans la capitale un campus de l’université chinoise de Fudan. Problème : le terrain prévu pour cet imposant chantier avait été destiné par Gergely Karácsony et son équipe municipale à la construction d’une résidence universitaire pouvant accueillir près de 8.000 étudiants.
Précision tout sauf anecdotique : Gergely Karácsony, l’un des leaders du parti des Verts en Hongrie, se range en bonne place parmi les opposants au Premier ministre, Viktor Orban. Il pointe même en tête des possibles candidats aux prochaines élections nationales, prévues en 2022. A l’évidence, sa campagne a déjà débuté. Le différend sur le projet universitaire ne serait qu’un prétexte, analyse la presse hongroise, à un bras de fer avec le gouvernement de Viktor Orban.
En attendant, la menace est réelle. Sans l’aval de la municipalité, la Hongrie ne pourra pas recevoir les Mondiaux en plein air en 2023, attribués par World Athletics dès l’année 2018. L’événement planétaire s’annonce comme le plus important rendez-vous sportif jamais organisé par la Hongrie. Le point d’orgue pour un pays et une ville qui ont multiplié les événements majeurs au cours des dernières années et envisagent toujours une nouvelle candidature aux Jeux d’été, sans doute pour l’édition 2036. La dernière tentative hongroise, Budapest 2024, avait été plombée par une campagne d’opposition d’un groupuscule politique. Face à la perspective d’un référendum, les leaders du projet avaient choisi de renoncer.
En Hongrie, la prise de position du maire de Budapest a provoqué un tollé parmi la communauté sportive. Logique. La Fédération hongroise d’athlétisme (MASZ) a tenu à réagir via un communiqué, où elle dénonce l’incursion d’un différend politique dans la préparation d’un événement sportif. Plusieurs athlètes ont également réagi, dont la lanceuse de poids Anita Márton, médaillée de bronze aux Jeux de Rio 2016.
« Le sport et la politique ne doivent pas être mélangés, a-t-elle explique au quotidien sportif Nemzeti Sport. Accueillir les championnats du monde est une grande opportunité pour la Hongrie, pour l’athlétisme hongrois, pour les gens qui aiment le sport. Je serais vraiment attristée si cela ne se réalisait pas. »
De son côté, le gouvernement de Viktor Orban s’est fendu d’un court communiqué : « La déclaration de Gergely Karácsony est sans fondement, le maire essaie clairement de détourner l’attention du public des embouteillages et du chaos qui perturbent la capitale. »
La guerre est déclarée. Partout ailleurs, un tel différent serait sans doute réglé par un compromis, et les Mondiaux d’athlétisme ne seraient pas menacés. Mais le précédent de la candidature de Budapest pour les Jeux en 2024, retirée de la course alors qu’elle avait séduit une partie du mouvement olympique et apporté un vent de fraîcheur dans la campagne, laisse envisager le pire.