Historique fin de semaine pour le mouvement sportif français. En l’espace de quelques heures, deux de ses dirigeants se sont assurés un siège présidentiel dans une fédération internationale d’un sport olympique.
David Lappartient l’a fait le premier, vendredi 24 septembre, avec un deuxième mandat à la tête de l’Union cycliste internationale (UCI). C’était prévu. Le Breton était seul candidat.
Luc Tardif l’a suivi dès le lendemain. Le natif de Trois-Rivières, au Canada, arrivé en France à la fin des années 70 pour y poursuivre sa carrière de joueur, a été élu à Saint-Pétersbourg à la présidence de la Fédération internationale de hockey sur glace (IIHF). Il succède au Suisse René Fasel, au pouvoir depuis 27 ans.
La victoire de Luc Tardif était nettement moins prévue. Le Français était opposé à quatre rivaux. A 68 ans, il l’a emporté au 4ème tour de scrutin, devançant le favori, l’Allemand Franz Reindl, avec 67 voix contre 39 pour son ultime concurrent.
Elu pour un mandat de cinq ans, Luc Tardif est devenu le 14ème président de l’instance internationale. Tout juste élu, il a reçu les félicitations de Vladimir Poutine, le président russe, et de Thomas Bach, le président du CIO. Au lendemain de sa victoire, il a répondu aux questions de FrancsJeux.
FrancsJeux : Vous n’étiez pas favori, mais vous avez pourtant pointé en tête à chacun des tours de scrutin. Qu’est-ce qui a fait la différence, notamment face à l’Allemand Franz Reindl, soutenu par le camp russe ?
Luc Tardif : J’ai été le dernier des cinq candidats à me lancer dans la campagne, mais tout au long de l’été j’ai effectué un tour du monde virtuel. J’ai rencontré en visioconférence 95 % des fédérations nationales membres de l’IIHF. Je voulais qu’ils m’expliquent ce qu’ils attendaient, je les ai donc écoutés. Puis j’ai testé avec eux certaines de mes idées. Parler 1 heure 30 avec des gens en tête à tête, même en mode virtuel, est assez rare. Dans un tel contexte, les gens parlent plus facilement que dans le cadre d’un congrès. Tout cela m’a permis de bâtir mon programme, que j’avais construit à partir de mes propres convictions. J’ai appelé cette phase de ma campagne le processus de co-construction. J’ai publié mon programme très tard, le 7 septembre, pour une élection prévue le 25 du même mois. Mais je savais qu’il collait à une certaine réalité. Ensuite, il a fallu convaincre. Les gens avaient envie de changement. Une dynamique a été créée. Mais cette victoire est aussi le travail de toute une équipe.
Que vous a dit René Fasel, votre prédécesseur, après votre élection ?
Je crois qu’il a été un peu surpris de la tournure des événements. J’en suis même sûr. Il a vu une envie de changement être exprimée par les fédérations. L’IIHF est en très bonne santé, notamment sur le plan financier, les bases sont solides. Mais avec désormais 80 fédérations membres, un déséquilibre s’est installé entre entre les grandes nations et les plus petites. Il faut maintenant de la diplomatie.
Quel est votre premier dossier de ce mandat de président ?
Les Jeux d’hiver de Pékin 2022 et la présence des joueurs de la NHL. Nous avons une entente, mais il va falloir finaliser et signer cet accord de principe avec toutes les parties, dont le comité d’organisation chinois. Tout semble sur les bons rails, mais devons rester prudents car nous ne connaissons pas encore quelles seront la situation sanitaire et les mesures décidées par les Chinois. Nous allons devoir décider d’une date butoir au-delà de laquelle, si les choses tournaient mal, les pays qualifiés pourraient se tourner vers un plan B.
Les Jeux de Pékin 2022 constituent-il un événement majeur pour le développement du hockey sur glace ?
C’est évident. Le principal potentiel de développement se situe là-bas, et plus largement en Asie. Beaucoup de sports l’ont compris. La NHL aussi a compris que les perspectives de business et de merchandising étaient très importantes. Nous ne devons pas manquer ce rendez-vous, il sera plus important que ceux de PyeongChang 2018 et Milan-Cortina 2026. Les conditions sanitaires restent inconnues, tout comme la présence de spectateurs. Mais les Jeux de Tokyo ont démontré que, même sans public, l’événement olympique pouvait être une grande réussite.
Pendant votre campagne, vous nous aviez expliqué que si vous étiez élu, vous réuniriez très rapidement vos rivaux pour travailler ensemble. Est-ce toujours d’actualité ?
Bien sûr. Et nous n’avons pas attendu. Samedi soir, après l’élection, nous avons tenu une première réunion du comité exécutif. Il a été renouvelé de moitié. Avec les quatre autres candidats, nous avions décidé d’une sorte de pacte pour nous mettre en ordre de marche dès la fin de l’élection, quel que soit le vainqueur du scrutin. Les dossiers sont nombreux : les Jeux de Pékin, la nomination des commissions, la désignation d’un nouveau secrétaire général… Il n’y a pas de temps à perdre.