Solide année pour le CIO. Présumée post-olympique (et pré-olympique pour l’hiver), donc plutôt calme et tranquille, 2021 restera dans les mémoires du mouvement olympique. Elle fera date. A plus d’un titre.
En l’espace de douze mois, l’instance olympique a invité le monde entier aux premiers Jeux de l’histoire reportés d’une année, elle a battu un nouveau record en attribuant une édition de son événement estival onze ans avant l’échéance (Brisbane 2032), changé la devise olympique en lui ajoutant un mot, saisi à bras le corps le phénomène des sports électroniques en organisant les premières Virtual Olympic Series, lancé sa plateforme de vente en ligne des produits dérivés des Jeux de Paris 2024, Milan-Cortina 2026 et Los Angeles 2028, exclu la Corée du Nord des Jeux de Pékin 2022, ajouté le surf, l’escalade et le skateboard au programme officiel des Jeux de LA 2028, et enfin rayé provisoirement du même programme le pentathlon moderne, la boxe et l’haltérophilie. Costaud.
Parmi ce lot fourni de décisions et d’initiatives, le jury du palmarès de FrancsJeux pour l’année 2021 en a désigné une. Ses dix-neuf membres ont sélectionné la nouvelle devise olympique – Plus vite, plus haut, plus fort – ensemble – comme la meilleure idée du CIO au cours de l’année 2021. Elle a recueilli 42 % des suffrages.
Présentée pour la première fois aux yeux du monde lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux de Tokyo, la nouvelle devise avait été annoncée quelques jours plus tôt par Thomas Bach. Le président du CIO l’avait justifiée par le besoin de solidarité en ces temps difficiles, marqués par la crise sanitaire mondiale.
« Nous devons adapter la devise à notre époque, a expliqué Thomas Bach pendant la session du CIO en marge des Jeux de Tokyo. L’effort de collaboration apporte des résultats plus rapides et meilleurs que de travailler en solitaire. C’est une étape importante dans notre développement, qui envoie un signal clair. Nous voulons mettre un accent particulier sur la solidarité. »
L’effort est louable. Mais le choix du nouveau mot, dans la version latine de la devise, n’a pas été très apprécié des spécialistes. La devise d’origine, « Citius, Altius, Fortius », adoptée à la fin du 19ème siècle par Pierre de Coubertin, le fondateur des Jeux modernes, est ainsi devenue « Citius, Altius, Fortius – Communiter » dans la version latine affichée par le CIO. Une hérésie, à en croire les plus pointus des latinistes.
Mario De Nonno, un professeur à l’université de Rome, l’a expliqué au site italien LabParlamento : « C’est tout à fait absurde. « ‘Communiter » veut dire « en commun« , dans le sens d’un partage matériel ou d’une distribution. Cela pourrait aller d’un point de vue morphologique, mais ce n’est pas approprié d’un point de vue sémantique. »
Au printemps dernier, le CIO avait d’abord proposé « Communis« , avant de pencher en faveur de « Communiter« . Mais son choix initial n’était pas non plus approprié. Ombeline Orlowski, une professeure de lettres classiques en région parisienne, l’a expliqué à FranceInfo : « Les adjectifs ‘citius, altius, fortius’ sont au neutre singulier mais prennent dans la devise olympique une forme adverbiale, avec un comparatif de supériorité. « Communis » est un adjectif. Surtout, cela veut dire universel, accessible à tous, public. »
Le CIO aurait-il perdu son latin ? Pas grave. Sa nouvelle devise semble avoir fait mouche. Mea culpa.