Après le boycott diplomatique, un nouveau sujet extra-sportif agite la sphère olympique à trois semaines de l’ouverture des Jeux d’hiver de Pékin 2022 : la crainte de l’espionnage informatique. Comme le premier, il pointe du doigt les autorités chinoises.
A l’origine, une interview dans le quotidien néerlandais de Volkskrant, parue en début de semaine. Le porte-parole du comité olympique des Pays-Bas, Geert Slot, y explique que l’instance a recommandé aux athlètes de la délégation de laisser chez eux leurs téléphones et ordinateurs portables au moment de prendre l’avion pour Pékin. Une recommandation suggérée par les risques d’espionnage des données personnelles par les autorités chinoises.
“La cybersécurité a bien sûr pris une plus grande importance au cours des dernières années, mais la Chine représente un cas très particulier, car ses autorités ont complètement verrouillé leur Internet”, a expliqué Geert Slot à de Volkskrant..
Depuis, la position des Néerlandais semble avoir fait tache d’huile. Une poignée d’autres pays, parmi les plus influents du mouvement olympique, a pris le parti de suivre le mouvement.
Un porte-parole du Comité olympique britannique (BOA) a confié au Guardian que la question avait été abordée avec les potentiels sélectionnés aux Jeux de Pékin 2022 : « Nous avons donné aux athlètes et à l’encadrement de la délégation des conseils pratiques pour qu’ils puissent faire leur propre choix, et décider s’ils emportent ou non leurs appareils personnels aux Jeux. S’ils ne veulent pas prendre leur propre équipement, nous mettons à leur disposition des appareils temporaires qu’ils pourront utiliser sur place. »
Même position côté australien. Le comité national olympique (AOC) recommande lui aussi aux membres de sa délégation ne pas emporter avec eux leurs téléphones ou ordinateurs portables. Des appareils de location seront mis à leur disposition dès leur arrivée dans la capitale chinoise. Ils serviront seulement le temps des Jeux.
Aux Etats-Unis, la question est prise très au sérieux. Tout sauf une surprise. Le comité olympique et paralympique (USOPC) a expliqué aux futurs membres de la Team USA, dans un bulletin récemment publié, que l’utilisation d’ordinateurs de location et des téléphones jetables était fortement « encouragée » aux Jeux de Pékin.
Le document rédigé par l’USOPC ne fait pas dans la nuance : « Comme les ordinateurs, les données et les applications des téléphones portables sont sujettes à des intrusions malveillantes, à des infections et à la compromission des données. Malgré toutes les mesures de protection mises en place pour protéger les systèmes et les données, il faut partir du principe que toutes les données et communications en Chine peuvent être surveillées, compromises ou bloquées. »
L’instance olympique et paralympique américaine n’exige pas des athlètes qu’ils voyagent vers Pékin sans le moindre appareil connecté. Mais elle leur suggère très fortement de privilégier des appareils loués sur place, ou au minimum d’effacer toutes les données personnelles de leurs portables, puis d’utiliser un VPN pendant leur séjour aux Jeux d’hiver.
Au Canada, la ministre fédérale des Sports, Pascale St-Onge, a confié à La Presse Canadienne que le gouvernement « travaillait en étroite collaboration » avec les comités nationaux olympique et paralympique sur la question de la cybersécurité. Une série de séances de formation et d’information a été organisée à l’intention des futurs membres de la délégation. Un « plan solide » a été préparé pour protéger les athlètes contre les risques d’espionnage par les Chinois. Mais il est classé secret défense.
En Chine, les craintes des délégations étrangères d’un espionnage des données personnelles des participants aux Jeux n’ont pas encore été officiellement commentées par les autorités. Sollicité par plusieurs médias, le comité d’organisation n’a pas non plus répondu. Le CIO, de son côté, a botté en touche lors du point presse technique organisé mercredi 12 janvier depuis Pékin et Lausanne, expliquant que la question était à poser aux comités nationaux olympiques concernés.
Mais un quotidien d’état chinois, le Global Times, a traité l’affaire dans un éditorial. Son auteur décrit la position des Néerlandais comme une nouvelle tentative de susciter des sentiments anti-chinois. « L’accusation est fondée sur des fake news, sur l’ignorance et les propres actes de l’Occident« , tranche le Global Times. Vraiment ?