Improbable. Au pointage de 13 heures, ce mardi 8 février à Pékin, la Chine pointait en tête au classement des médailles des Jeux d’hiver 2022. Le pays-hôte, longtemps montré du doigt comme un cancre des disciplines hivernales, comptait cinq médailles, dont trois en or. Il devançait la Suède, l’équipe du Comité olympique de la Russie (ROC), les Pays-Bas et l’Allemagne.
Cinq médailles dont trois titres à moins d’un tiers des Jeux de Pékin : la Chine a déjà réussi son pari. Sept mois après Tokyo 2020 et l’historique performance japonaise, elle démontre que l’avantage du terrain peut faire des miracles, même en l’absence de public. Elle prouve aussi que les moyens considérables consentis par les autorités pour préparer les athlètes ont été judicieusement dépensés.
Avec un tel début, les voyants sont tous au vert. La situation sanitaire est sous contrôle (seulement 6 cas positifs pour la journée du 7 février). La cérémonie d’ouverture a crevé l’écran à la télévision chinoise (316 millions de téléspectateurs). Les températures remontent (7° dans Pékin ce mardi). Peng Shuai se montre un peu partout, à la patinoire et au pied des pistes, visiblement ravie de sa semaine. Quant à la mascotte officielle, le panda Bing Dwen Dwen, elle est déjà en rupture de stock dans les boutiques officielles.
Cool. Mais les Chinois présentent une copie nettement moins brillante sur l’un des enjeux majeurs de la réussite des Jeux : les transports. Certes, les deux trains olympiques, reliant Pékin à Yanqing (26 minutes) et Zhangjiakou (50 minutes), font l’admiration des accrédités. Luxe, confort et volupté. Mais le réseau des bus officiels se révèle un désastre. Et l’aventure d’un périple depuis la capitale vers une épreuve de ski, alpin ou nordique, peut tourner au cauchemar.
Première difficulté : rejoindre la gare de Qinghe à Pékin. Le trajet requiert deux bus successifs depuis les hôtels officiels. Les navettes sont censées circuler sans entrave, grâce notamment à la présence sur les axes routiers d’une voie olympique. Mais la réalité s’avère différente. Lundi 7 février, le passage d’un convoi de voitures officielles conduisant un dignitaire à la gare a bloqué la circulation pendant une vingtaine minutes. Résultat : plusieurs groupes d’accrédités ont raté le train pour Yanqing, site des épreuves de ski alpin. Parmi eux, la Suédoise Petra Sörling, la nouvelle présidente de la Fédération internationale de tennis de table (ITTF).
La suite ? A la descente du train, un premier bus conduit les accrédités vers une immense gare routière, posée au milieu de nulle part. L’arrêt est obligatoire. Tout le monde descend. Une deuxième navette prend alors le relais pour se rapprocher des montagnes et des sites de compétition. « C’est encore loin« , demande-t-on aux volontaires entre deux regards sur l’horloge. Réponse : « Environ une heure, selon le trafic. »
Les choses pourraient en rester là, mais le périple réserve encore son lot de surprises. La deuxième navette est prolongée par une troisième, laquelle dépose les plus chanceux au départ du télécabine menant au pied des pistes. Deux bus, un train, trois autres navettes, un télécabine. Trois bonnes heures avec une réussite optimale, jusqu’à cinq heures pour les plus malchanceux.
Le retour vers Pékin peut tourner, lui aussi, au scénario catastrophe. En fin de journée, la fréquence des navettes s’étire sans fin, jusqu’à virer à la mauvaise plaisanterie. Une navette toutes les deux heures, à partir de 18 h, pour rejoindre la capitale depuis la gare routière. Lundi 7 février, un groupe d’une vingtaine de journalistes s’est ainsi retrouvé bloqué sur un parking glacial, pendant plus d’une heure trente, dans l’attente d’un bus.
Question de l’un d’eux à un jeune volontaire : « Avec un tel froid, serait-il possible d’attendre à l’intérieur, dans une pièce ou sous une tente? » Réponse gênée du bénévole chinois : « Non, désolé, cela n’est pas prévu. » Autre question au même volontaire : « Nous sommes tout un groupe, ne pourriez-vous pas ajouter un bus et nous amener à Pékin ou à la gare de train ? » Le volontaire : « Attendez, je vais demander à mon manager. » Coup de fil bref. Puis cette réponse : « Non. Désolé« .
Dernier détail : les horaires des navettes officielles peuvent changer d’un jour à l’autre, au gré de considérations très obscures. Valables le lundi, obsolètes le lendemain.