Deux semaines ont passé depuis l’annonce par le CIO de sa « recommandation » aux fédérations internationales de bannir les athlètes russes et biélorusses des compétitions internationales. Deux semaines au cours desquelles le mouvement olympique a manifesté une rare unité.
Les instances ont suivi la consigne du CIO. La plupart ont fermé totalement la porte aux représentants des deux pays. Mais plusieurs d’entre elles, dont la FINA (natation) et l’IJF (judo), ont choisi une voie médiane : elles ont banni la Russie et la Biélorussie, mais en permettant à leurs athlètes de disputer les compétitions sous bannière neutre.
Côté gouvernance, en revanche, le paysage reste moins clair. Certes, les sanctions imposées par l’Union européenne, dont la saisie de ses avoirs, ont contraint le Russe Alisher Usmanov de se mettre en retrait de la présidence de la Fédération internationale d’escrime (FIE). Mais les deux autres Russes à la tête d’une instance sportive internationale, Umar Kremlev à la boxe (IBA), et Vladimir Lisin au tir (ISSF), sont toujours en place.
Même situation au CIO. Ses deux membres russes, Shamil Tarpishchev et Yelena Isinbayeva, conservent leur statut. Ils ne sont pas bannis, à la différence des athlètes. Et pas non plus écartés à titre temporaire.
La suite ? Elle s’annonce confuse. Sur le terrain sportif, à savoir les compétitions, les Ukrainiens devraient pouvoir tenir leur place, malgré l’invasion de leur pays et les difficultés d’entraînement et de voyage. L’effort de solidarité initié par plusieurs fédérations internationales (boxe, canoë-kayak) devrait permettre aux athlètes de tenir leur rang. Une délégation ukrainienne composée de six athlètes, toutes féminines, est annoncée en fin de semaine aux Mondiaux d’athlétisme en salle à Belgrade (18 au 20 mars).
Les Russes, en revanche, peuvent remiser leurs tenues. La participation aux compétitions leur est désormais quasiment impossible, y compris dans les sports où elle est autorisée sous couvert de neutralité. Pour preuve l’annonce récente de la Fédération russe de judo de renoncer à toutes les épreuves internationales. L’instance explique sa décision par l’insécurité qui pourrait envelopper ses judokas dans les compétitions, et par l’impossibilité de voyager dans un grand nombre de pays dans le monde.
Ailleurs, le mouvement olympique peut s’attendre à une période incertaine. Saisi par la Fédération russe de football, après son exclusion par la FIFA des barrages pour le Mondial 2022 au Qatar, le Tribunal arbitral du sport (TAS) doit rendre son verdict dans les jours à venir. Il devrait donner le ton aux possibles procédures à venir.
Sebastian Coe, le président de World Athletics, l’a expliqué en début de semaine à l’occasion d’un point presse en ligne : « Je ne connais pas une seule fédération sportive qui souhaite naturellement exclure des équipes ou des individus. Nous, les dirigeants, ne sommes pas venus dans le sport avec cette idée. Mais ce qui est en train de se passer (l’invasion russe en Ukraine) change la donne. Il est évident que cela va créer des précédents. Ils devront être affrontés individuellement, les uns après les autres. Et ils vont nous accompagner pendant des années. En choisissant l’exclusion, nous ne nous facilitons pas les choses. Mais cette décision était la bonne ».
A la différence de la plupart de ses homologues, Sebastian Coe parle d’expérience. World Athletics n’avait pas attendu la guerre en Ukraine pour rayer la Russie de la carte de l’athlétisme mondial. Sa fédération, la RusAF, est exclue depuis la fin de l’année 2015 pour avoir instauré une culture du dopage à l’échelle nationale. La participation des athlètes russes était, jusqu’à ces deux dernières semaines, conditionnée à l’obtention d’un statut de neutralité.
« Je n’ai pas de problème avec l’interdiction des athlètes russes, insiste Sebastian Coe. Nous l’avons fait dans notre sport. Je ne vois pas pourquoi cela devrait être différent ailleurs, lorsque cette participation menace l’intégrité d’une discipline. »
Le Britannique l’anticipe : le mouvement sportif international devra rester solide sur ses positions. « L’impact du conflit est général, suggère le Britannique. Les autres fédérations internationales vont devoir rester très fermes. Et faire exactement ce que nous avons fait. »