Confus. Et même, allez, totalement cacophonique. Depuis la « recommandation » du CIO de bannir les athlètes et officiels russes et biélorusses des compétitions internationales, un certain désordre s’est installé dans le mouvement sportif. La pagaille n’est plus très loin.
Le CIO n’y est pas étranger. Certes, l’instance olympique a été prompte à ouvrir la boite aux sanctions après l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe, fin février, appelant à bannir les athlètes des deux pays belligérants. Mais elle n’a toujours pas suspendu ses propres membres russes, au nombre de quatre (dont deux membres actifs), malgré la pression des autorités suisses.
Conséquence ou pas, le bateau tangue et menace de prendre l’eau. Au cours des derniers jours, les exemples ont été nombreux d’une gestion de la question russe parfois très hasardeuse dans le mouvement sportif.
En fin de semaine passée, la Fédération internationale de natation a annoncé avoir suspendu pour une période de neuf mois le nageur russe Yevgeny Rylov, champion olympique du 100 et 200 m dos aux Jeux de Tokyo 2020. En cause, sa participation le mois dernier à un rassemblement pro-Vladimir Poutine à Moscou. La commission de discipline de la FINA a estimé qu’il avait enfreint les règles par “sa participation présumée à un rassemblement pro-guerre”.
Mais selon l’agence russe TASS, Yevgeny Rylov est engagé aux championnats de Russie de natation, qui ont débuté dimanche 24 avril à Kazan. Il doit disputer les trois distances du dos, 50, 100 et 200 m. Le double champion olympique est pourtant suspendu par la FINA jusqu’au mois de janvier prochain. Une suspension dont il ne semble pas faire grand cas. Sa fédération non plus. Elle a validé sa participation. Son président, l’ancien nageur Vladimir Salnikov, est pourtant membre du Bureau de la FINA.
Autre cas : la boxe. Sa fédération internationale, l’IBA, reste à ce jour la seule instance du mouvement olympique avec l’ISSF (la fédération internationale de tir) toujours présidée de manière active par un officiel russe. Elu en décembre 2020, Umar Kremlev n’a pas abandonné son bureau depuis le début du conflit en Ukraine, même à titre provisoire.
L’IBA l’a annoncé en fin de semaine passée : Umar Kremlev sollicitera un nouveau mandat le mois prochain lors du congrès élection de l’instance à Istanbul. Certes, il ne sera pas le seul candidat, le Néerlandais Boris van der Vorst ayant lui aussi déposé une candidature. Mais la présence d’Umar Kremlev comme candidat sortant, représentant d’un pays banni du mouvement olympique, donnera au scrutin une dimension plus politique que jamais.
Le patinage affiche lui aussi un curieux paysage. Sa fédération internationale, l’ISU, a suivi la recommandation du CIO. Elle a banni les athlètes russes et biélorusses. Mais la Russie et la Biélorussie apparaissent en masse dans la liste des pays candidats aux événements internationaux pour les quatre prochaines années, dévoilée par l’ISU en fin de semaine passée.
La Russie a déposé quatre dossiers de candidature. Moscou, la capitale, postule à l’accueil des championnats du monde juniors de patinage de vitesse en 2025 et 2026. Sotchi est candidate à l’organisation des Mondiaux juniors de short-track en 2025. Kolomna ambitionne de recevoir les championnats d’Europe de patinage de vitesse en 2026
La Biélorussie, de son côté, a déposé cinq dossiers de candidature à l’ISU. Minsk, la capitale, souhaite notamment obtenir les Mondiaux juniors de patinage artistique en 2024 et les championnats d’Europe de patinage de vitesse en 2025.
Au tennis, la décision des organisateurs de Wimbledon de bannir les joueurs russes et biélorusses continue de susciter les critiques du milieu. Steve Simon, le patron de la WTA (l’Association des joueuses professionnelles), a confié au Tennis Podcast que cette annonce avait été « extrêmement décevante« . L’Américain a insisté : « La seule chose sur laquelle notre sport a toujours été d’accord est que l’entrée dans nos événements doit être basée sur le mérite, sans la moindre discrimination. »
Steve Simon a annoncé, au cours de la même interview, que la WTA allait rapidement réunir ses parties prenantes pour discuter de la position à adopter. Il a laissé entendre qu’il serait sans doute décidé d’appliquer des « sanctions fortes » à l’encontre des organisateurs de Wimbledon.
Au tennis, exclure les athlètes russes et biélorusses est jugé discriminatoire et passible de sanctions. Partout ailleurs dans le mouvement sportif, une telle décision est applaudie des deux mains. Confus.