Embarrassant. La neutralité reste la norme parmi les athlètes russes depuis le début du conflit en Ukraine, mais ils sont de plus en plus nombreux à afficher ouvertement leur soutien à Vladimir Poutine. En tête de cortège, les gymnastes.
L’agence TASS rapporte que Nikita Nagornyy, quadruple médaillé olympique, titré l’été dernier aux Jeux de Tokyo au concours général par équipes, a participé très activement lundi 9 mai au défilé du Jour de la Victoire à Moscou. Organisée tous les ans à la même date, la parade commémore la victoire de l’armée rouge soviétique sur l’Allemagne nazie, le 9 mai 1945.
Le gymnaste russe a défilé au sein des unités du corps national des jeunes cadets de l’armée. Toujours selon TASS, il a ensuite confié vouloir appeler ses grands-parents. « Quand je leur ai dit que je participerai au défilé de la Victoire à la tête du groupe de Yunarmiya, ils ont fondu en larmes« , a expliqué Nikita Nagornyy.
Lundi 9 mai, Nikita Nagornyy n’était pas le seul athlète russe présent à Moscou pour afficher son patriotisme et son soutien au régime du Kremlin. Angelina Melnikova, elle aussi multiple médaillée olympique à Rio 2016 et Tokyo 2020 en gymnastique, a également défilé sur la Place Rouge.
La jeune femme n’a pas craint de s’afficher. Le site Gymnovosti a publié sur son compte Twitter une photo où elle pose en compagnie d’un vétéran de l’armée russe, en tenant à la main un carton marqué de la lettre Z, le symbole militariste associé aux partisans de l’invasion de l’Ukraine (photo ci-dessus).
Selon les médias russes, deux autres médaillés olympiques, les lutteurs Roman Vlasov et Musa Evloev, auraient également participé au défilé lundi 9 mai à Moscou.
Ils ne sont pas les premiers. Svetlana Khorkina, l’une des légendes de la gymnastique russe, sept fois médaillée olympique entre Atlanta 1996 et Athènes 2004, avait ouvert la voie en partageant sur son compte Instagram plusieurs images d’elle affichant la lettre Z. L’une d’elle était accompagnée de cette légende : « Une campagne pour ceux qui n’ont pas honte d’être russes ».
Agée de 43 ans, Svetlana Khorkina n’a jamais caché son soutien au régime de Kremlin. Entrée en politique à la fin de sa carrière sportive, elle a été conseillère pour le sport de Vladimir Poutine.
Les cérémonies de commémoration de l’annexion de la Crimée par la Russie, le 18 mars dernier, ont également été marquées par la présence remarquée de plusieurs figures du sport russe au stade Luzhniki. En tête de liste, le nageur Evgeny Rylov, champion olympique sur 100 et 200 m dos l’été dernier à Tokyo.
Sanctionné par la Fédération internationale de natation (FINA) d’une suspension pour avoir enfreint ses règles en s’affichant à une manifestation politique, Evgeny Rylov s’était défendu en expliquant avoir seulement voulu honorer une invitation à un concert. Il a ensuite défié la FINA en s’alignant aux championnats nationaux de natation, malgré son interdiction de compétitions.
Plusieurs autres athlètes, dont les soeurs gymnastes Dina et Arina Averina, ont participé aux commémorations du stade Luzhnik. Certains d’entre eux ont même exhibé leurs médailles et le symbole Z.
Un peu plus tôt dans le mois, un jeune gymnaste russe, Ivan Kuliak, s’est présenté sur le podium d’une compétition internationale à Doha habillé d’un maillot où avait été cousu à la va-vite la lettre Z. La Fédération internationale de gymnastique (FIG) a annoncé l’ouverture d’une enquête. Ivan Kuliak pourrait lui aussi être suspendu.
Pour les instances sportives internationales, la position résolument militariste de certains athlètes russes annonce un sérieux casse-tête. Faut-il les sanctionner pour avoir affiché leur patriotisme ? La FINA a tranché en suspendant Evgeny Rylov pour une période de neuf mois. Mais la sanction n’a pas semblé beaucoup affecter le nageur. Il l’a expliqué aux médias de son pays : « J’étais de toute façon déjà banni de toutes les compétitions en raison de ma seule nationalité. »