L’affaire tourne au feuilleton. Avec un épisode par jour, un lot fourni de révélations, mais un épilogue encore incertain. Jeudi 18 août, au lendemain de l’arrestation de quatre personnes pour des faits présumés de corruption liés aux Jeux de Tokyo 2020, un nouveau coin du voile a été levé au Japon sur le scandale Takahashi/Aoki.
Première découverte, rapportée par plusieurs médias japonais, dont l’agence Kyodo News : la société Aoki Holdings Inc, associée depuis l’automne 2018 aux Jeux de Tokyo 2020 en qualité de supporteur officiel, aurait bénéficié d’un traitement plus qu’avantageux de la part du comité d’organisation. Son partenariat avec l’événement olympique et paralympique lui aurait coûté moins de la moitié du tarif normal.
Selon certaines sources proches de l’enquête, l’entreprise de costumes et de vestes pour hommes aurait payé seulement 500 millions de yens, soit environ 3,7 millions de dollars, pour rejoindre le programme national de marketing de Tokyo 2020.
A l’époque de la signature, moins de deux ans avant la date initiale des Jeux d’été, il en coûtait encore trois fois plus pour obtenir le droit de s’afficher comme supporteur officiel, le troisième niveau du programme de marketing. Le tarif standard était fixé à 1,5 milliard de yens, soit un peu plus de 11 millions de dollars au cours actuel.
Les partenaires de premier rang, le niveau « gold », devaient quant à eux s’acquitter de la somme de 15 milliards de yens (110 millions de dollars).
Aoki Holdings aurait donc bénéficié d’un contrat au rabais, mais sans pour autant devoir renoncer aux avantages liés à son statut de supporteur officiel. La marque japonaise a pu développer et commercialiser une ligne de costumes siglés Tokyo 2020. Elle en aurait vendu plus de 30.000 au Japon. Elle a également habillé la délégation japonaises pour les cérémonies d’ouverture des Jeux de Tokyo.
Entrée dans la place avec un ticket au tiers de son prix, Aoki Holdings a ensuite pu faire preuve de largesse en affectant la somme de 250 millions de yens (1,84 million de dollars) à un programme de soutien aux athlètes japonais. Généreux, mais seulement en apparence.
Aux manettes de la transaction, Haruyuki Takahashi. Présenté depuis le début comme le personnage central de l’affaire, le dirigeant japonais aurait servi d’intermédiaire entre la marque de vêtements pour hommes et le comité d’organisation, dont il siégeait au conseil d’administration.
Haruyuki Takahashi a été arrêté mercredi 17 août pour des faits présumés de corruption. Hironori Aoki, le fondateur et ancien président de l’entreprise, et deux autres cadres de l’enseigne, ont également été arrêtés.
Autre révélation du jour : Haruyuki Takahashi aurait annoncé à Hironori Aoki que sa société avait été choisie comme supporteur officiel une année avant l’annonce officielle. Selon plusieurs sources citées par les médias japonais, l’ancien patron de l’agence Dentsu aurait signifié au cours de l’été 2017 au président d’Aoki Holdings, et à deux autres cadres de l’entreprise, que leur société serait bientôt associée aux Jeux de Tokyo. Elle l’a été seulement à partir du mois d’octobre 2018.
Quelques mois seulement après cette « indiscrétion », le cabinet de conseil dirigé par Haruyuki Takahashi a commencé à recevoir des paiements mensuels de la part d’Aoki Holdings. Les versements, dont le nombre atteindrait une cinquantaine, se sont poursuivis pendant près de cinq ans.
Pour sa défense, Haruyuki Takahashi avait expliqué aux enquêteurs, avant son arrestation, avoir proposé à Aoki Holdings un contrat de sponsoring des Jeux de Tokyo après que l’agence Dentsu, en charge de la recherche de sponsors, ait échoué dans sa quête d’un fournisseur officiel de costumes.