Une page vient d’être tournée pour la Coupe du Monde de rugby 2023 en France. A moins d’une année de l’échéance, elle ne concerne ni de près ni de loin la préparation proprement dite du tournoi planétaire, et encore moins son essence même, le jeu. Mais elle n’en est pas moins déterminante pour son organisation.
Claude Atcher (photo ci-dessus), le directeur général du GIP (Groupement d’intérêt public) France 2023 depuis sa création en mai 2018, a été révoqué de son poste, lundi 10 octobre, à l’issue d’un vote du conseil d’administration du comité d’organisation. Sa révocation est à effet immédiat. L’ancien troisième ligne, l’un des personnages les plus influents du rugby français, acteur majeur de la victoire de la France dans la campagne pour l’attribution du Mondial 2023, disparait du paysage. A 66 ans, sa révocation a des allures de fin définitive de partie.
La décision du conseil d’administration de France 2023 était attendue. Selon plusieurs sources, le vote en faveur de la révocation de Claude Atcher n’a pas fait l’ombre d’un doute. Les trois actionnaires du GIP – la Fédération française de rugby (FFR), l’Etat et le CNOSF – se sont accordés pour montrer la sortie à un personnage devenu trop encombrant, à onze mois de la Coupe du Monde.
L’affaire Claude Atcher a débuté à la fin du mois de juin dernier. Son point de départ : une longue enquête du quotidien L’Equipe, où est révélé un climat terriblement dégradé au sein de France 2023. Les témoignages de salariés décrivent « un management par la terreur » exercé par Claude Atcher. L’enquête pointe également des irrégularités d’ordre financier, le directeur général du GIP étant soupçonné d’utiliser à des fins personnelles la carte de crédit et la voiture avec chauffeur du comité d’organisation.
Deux mois plus tard, le 29 août, la ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra, annonce la mise à pied à titre conservatoire de Claude Atcher, une décision motivée par la remise d’un premier rapport du comité d’éthique du GIP France 2023.
Sa mise à l’écart du comité d’organisation, sans rémunération, laisse le temps pour une poursuite de la procédure lancée par la ministre. Une mission de l’inspection du travail est menée au comité d’organisation. Son rapport a été rendu à la fin du mois de septembre à Jacques Rivoal, le président du GIP.
Lundi 10 octobre, l’AFP a annoncé en début d’après-midi la convocation en urgence, pour le jour même, d’un conseil d’administration extraordinaire de France 2023. A l’ordre du jour, la révocation de Claude Atcher, reçu plus tôt par Jacques Rivoal pour un entretien préalable, mais aussi la confirmation comme nouveau directeur général de Julien Collette, qui assurait l’intérim à la tête de l’organisation, et la nomination de Martine Nemecek comme directrice générale adjointe.
A en croire une source proche du dossier citée par l’AFP, Claude Atcher « s’est accroché tout l’été » pour garder son poste. Son sort semblait pourtant scellé depuis plusieurs semaines.
La préparation de la Coupe du Monde de rugby 2023 se poursuivra donc sans Claude Atcher, sa figure la plus reconnaissable, tellement associé à l’événement qu’il se prenait parfois à en parler comme de sa chose. Mais les ennuis ne sont pas terminés pour le désormais ex directeur général du GIP.
Claude Atcher a comparu le mois dernier devant le tribunal correctionnel de Paris, en compagnie notamment du président de la FFR, Bernard Laporte, pour « recel d’abus de confiance« . Il est accusé d’avoir reçu des sommes indues à partir de 2017, pour le compte de sa société Score XV, dans le cadre de la candidature de la France au Mondial 2023.
Les procureurs ont requis contre lui deux ans de prison, dont un avec sursis, trois ans d’interdiction de gérer une société commerciale, une année d’interdiction de toute fonction dans le rugby, plus une amende de 50.000 euros. Le jugement devrait être rendu le 13 décembre.
En parallèle, une enquête de l’Inspection générale des finances a été diligentée par le ministère des Sports. Elle s’intéresse à de possibles dysfonctionnements d’ordre financier dont se serait rendu coupable Claude Atcher dans sa fonction de directeur général de France 2023. Son rapport est attendu dans les prochaines semaines.