A moins de deux ans de l’événement (J – 651 jours ce vendredi 14 octobre), le COJO Paris 2024 multiplie les annonces. Le plan billetterie, plus l’identité du directeur artistique des cérémonies (Thomas Jolly), et plus récemment le parcours de du marathon, avant le dévoilement à venir du programme des volontaires, puis la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques.
En France, les Jeux de Paris 2024 gagnent de la place dans l’actualité. Mais qu’en est-il à l’étranger ? Comment l’événement olympique et paralympique, et surtout sa préparation, sont-ils perçus par les médias internationaux ?
FrancsJeux a interrogé trois journalistes experts du mouvement olympique et de son événement majeur : les Américains Alan Abrahamson (3 Wire Sports) et Ed Hula (Around the Rings), et le Belge Philippe Vande Weyer (Le Soir).
FrancsJeux : Quelle est votre perception, en tant que journaliste étranger, du COJO Paris 2024 ?
Alan Abrahamson : Un COJO doit sous-promettre et sur-délivrer. Paris 2024 fait exactement le contraire : il promet trop et risque fort de ne pas tenir ses promesses. Et il semble qu’il en soit ainsi depuis le premier jour de la candidature.
Ed Hula : J’ai une impression positive du COJO. Les dirigeants sont compétents, expérimentés et appartiennent à une nouvelle génération d’officiels sportifs. Cette équipe dégage une énergie qui devrait contribuer à la réussite des Jeux.
Philippe Vande Weyer : Jusqu’à la dernière visite de la commission de coordination, à la fin du mois d’août, je n’avais qu’une perception très parcellaire du COJO Paris 2024, n’ayant jamais vraiment été en contact avec lui. Je ne recevais, par exemple, aucun communiqué de Paris 2024. Suite à mon reportage en compagnie de Pierre-Olivier Beckers pour suivre la commission de coordination (à ma demande et mon initiative), j’ai enfin pu rencontrer des membres de l’équipe et nouer des liens professionnels qui, je l’espère, me seront utiles dans les deux ans à venir. Je compte aussi sur le World Press Briefing d’octobre pour rencontrer d’autres personnes de l’organisation. J’ai en tout cas pu constater sur place que l’envie de communiquer était grande. Et j’ai été extrêmement bien reçu.
Quel est, selon vous, le principal risque qui menace aujourd’hui les Jeux de Paris 2024 ?
Alan Abrahamson : 1. La sécurité. Je pense que l’idée de la cérémonie d’ouverture est séduisante dans son concept, mais extrêmement peu réaliste. En ce 50ème anniversaire des événements de Munich 1972, croisons les doigts pour que cela ne devienne pas une terrible tragédie. 2. Les sources de revenus par rapport à l’inflation et aux dépassements de coûts. Les « réformes » vantées seront vides de sens si les premiers Jeux de l’Agenda 2020 s’avèrent un désastre financier, ce qui risque d’être le cas.
Ed Hula : Je crains que la guerre en Ukraine et ses conséquences sur le continent et le monde entier soient la plus grande menace pour l’organisation des Jeux de Paris 2024. Un conflit qui s’étend, des pressions économiques et sociales, des questions de sécurité, des défis diplomatiques, sont autant de complications à venir pour Paris 2024 et le CIO.
Philippe Vande Weyer : La principale menace est clairement le contrôle des coûts, rendu plus difficile par l’inflation liée à la guerre en Ukraine. On sent qu’il s’agit d’un souci de tous les instants, encore souligné par la ministre des Sports, Amélie Ouéda-Castéra, lors de la dernière visite de la commission de coordination du CIO.
Que pensez-vous du slogan, « Des Jeux grands ouverts » ?
Alan Abrahamson : En anglais, ce slogan – « Wide Open » – peut également avoir, selon le contexte, une connotation plutôt malheureuse. Je me demande sérieusement si quelqu’un a bien réfléchi à la question.
Ed Hula : Pour moi, ce slogan suggère des Jeux olympiques qui ne seront pas étouffés par des protocoles et des règles, des Jeux olympiques qui pourront être une expression de joie et de célébration, et non le symbole d’un défi à la pandémie.
Philippe Vande Weyer : Il démontre une volonté de faire de ces Jeux autre chose qu’une affaire parisienne, ce qui est une bonne chose, même si j’ai cru comprendre en lisant certains commentaires que l’implication des autres régions restait un problème. Le slogan est un beau jeu de mots, mais je préférais celui des Jeux de Londres 2012, « Inspire a Generation« .
À moins de deux ans de l’événement, pensez-vous que Paris 2024 occupe suffisamment la scène médiatique ?
Alan Abrahamson : Les organisateurs de Paris 2024 doivent se lever chaque matin et remercier le ciel de ne pas être Milan-Cortina 2026. Ça, c’est une vraie pagaille.
Ed Hula : Ils pourraient faire plus, maintenant que la vague de Tokyo/Pékin s’est calmée. Paris doit renforcer sa position d’une date importante du calendrier 2024, une date à attendre avec beaucoup d’impatience, plutôt qu’un événement à redouter en raison des défis imposés par la pandémie pour Tokyo et Pékin. Ramener les gens aux Jeux olympiques est une autre façon d’interpréter leur slogan.
Philippe Vande Weyer : A vrai dire, pas vraiment. Heureusement que, en tant que francophone, je peux suivre les évolutions du dossier via la presse française… et FrancsJeux, bien évidemment ! Mais j’imagine que les choses vont un peu s’emballer maintenant que l’on a dépassé le cap des J -2 ans.