Les chiffres peuvent se montrer trompeurs. A Séoul, l’assemblée générale de l’Association des comités nationaux olympiques (ACNO) s’est ouverte ce mercredi 19 octobre, en début de matinée, dans une salle généreusement remplie. Selon le pointage officiel, 186 comités olympiques sont représentés dans la capitale sud-coréenne, sur les 206 organisations nationales membres du mouvement. Les autres suivent les travaux en ligne, à distance.
En ces temps de post-pandémie, le résultat reste très respectable. Mais deux comités nationaux ont animé les débats de cette première matinée de l’assemblée générale. L’un par sa présence, la Russie. L’autre pour son absence, l’Ukraine.
Comme annoncé depuis plusieurs semaines, les Russes ont fait le voyage vers Séoul. Ils étaient invités. Ils ont saisi l’opportunité. Une délégation du Comité olympique de Russie (ROC), conduite par son président, Stanislav Pozdnyakov (photo ci-dessus), est présente à l’assemblée générale de l’ACNO. Ses délégués portent autour du cou leur accréditation. Tout juste se distinguent-ils du reste des officiels du mouvement olympique par l’absence du drapeau national posé sur leur table, dans la salle de conférence.
Les Russes sont là. Et leur présence à elle seule suffit à fissurer l’impression d’unité que le mouvement olympique aimerait afficher depuis la capitale sud-coréenne.
Avant l’ouverture de l’assemblée générale, onze comités nationaux olympiques ont écrit un courrier commun au président de l’ACNO, le Fidjien Robin Mitchell, pour lui exprimer leur désaccord face à la présence à Séoul des officiels russes et biélorusses. Parmi eux, le Danemark, la Finlande, la Lituanie, la Lettonie, la Norvège, l’Islande, la Suède et la Nouvelle-Zélande.
Mercredi matin, Thomas Bach n’a pas éludé le sujet. Il en a même fait l’ouverture, et sans doute la partie la plus écoutée, de sa longue allocution devant l’assemblée générale de l’ACNO.
Le président du CIO a justifié la présence des comités nationaux russe et biélorusse. « La guerre n’a pas été déclarée par les Russes, les organisations russes et les athlètes russes, a suggéré le président du CIO. Nous ne devons pas les sanctionner. Nous devons sanctionner les responsables de cette guerre« .
Thomas Bach a insisté : les sanctions recommandées par le CIO au début du conflit en Ukraine, et les mesures prises par le mouvement olympique, ne doivent pas être levées. Mais il a appelé les comités nationaux olympiques à rester sagement dans cette ligne de conduite, sans chercher à s’en écarter. « Ne faites pas moins, car faire moins signifie que vous divisez le mouvement olympique, a-t-il expliqué. Ne faites pas plus, car faire plus signifie que vous divisez le mouvement olympique. »
Le message est clair : le CIO en appelle à l’unité. « Choisissez la voie de l’unité et de la paix, a martelé Thomas Bach. Chacun d’entre vous est d’abord et avant tout un membre de notre mouvement olympique mondial. Gardez cela à l’esprit et n’oubliez jamais que vous, votre autonomie, vos athlètes, pourraient être les prochains à être sanctionnés pour des raisons politiques. »
Déterminé à justifier la présence d’officiels russes et biélorusses, Thomas Bach a évoqué la réunion cette semaine de l’assemblée générale des Nations unies. « En ce moment, alors que nous sommes réunis ici, l’assemblée générale des Nations unies se réunit avec la pleine participation de tous ses États membres, que leurs pays soient en conflit ou non. Nous ne serons pas plus politiques que les politiciens », a-t-il insisté.
Convaincant ? Pas sûr. Le discours de Thomas Bach terminé, le Danemark a demandé la parole. « Nous avons ici la présence des comités nationaux olympiques russe et biélorusse, mais nous sommes sans la présence de l’Ukraine, a très posément suggéré le président du comité olympique danois, Hans Natorp. Cela devrait être le contraire. Nous avons besoin d’unité. Cela repose sur les principes de l’ONU et de la Charte olympique. »
Réponse très sèche de Thomas Bach : « L’unité signifie aussi que nous sommes dans une organisation démocratique, où nous respectons la majorité claire. Nous ne mettons pas tout le monde dans le même sac à cause des actions de leur gouvernement. S’il vous plaît, gardez à l’esprit que vous êtes un membre de ce mouvement olympique« .
Le débat aurait pu se prolonger. Et, avec lui, le mouvement olympique afficher ses divisions sur la question russe. Mais Robin Mitchell l’a écourté sans ménagement. Plusieurs autres signataires du courrier anti-Russes demandant à leur tour la parole, le président de l’ACNO a prévenu : « La discussion qui vient de s’achever sera probablement la dernière sur la politique« .