La tension monte dans le mouvement olympique. Et elle pourrait encore grimper de plusieurs crans dans les heures à venir. En cause, la volonté exprimée par le CIO « d’explorer une voie » permettant une réintégration des athlètes russes et biélorusses dans les compétitions internationales. Une voie qui pourrait passer par l’Asie puis, dans un deuxième temps, conduire aux Jeux de Paris 2024.
Une réunion est prévue ce vendredi 10 février entre les ministres des sports d’une trentaine de pays d’Europe pour évoquer la question et, en cas de consensus, adopter une position commune. Sauf retournement de situation, elle n’ira pas dans le sens de Lausanne.
Organisée en visioconférence à l’initiative de la Grande-Bretagne, elle sera menée par la nouvelle secrétaire britannique à la Culture, Lucy Frazer. Les pays nordiques et baltiques devraient y représenter la ligne dure, après avoir été les premiers à s’opposer fermement à un retour des athlètes russes et biélorusses, jusqu’à suggérer un boycott des Jeux de Paris 2024.
Peu attendu, mais confirmé jeudi 9 février : le président ukrainien, Volodymyr Zelenskyy, en sera l’un des intervenants. Il devrait s’exprimer par liaison vidéo. Sans présager de la teneur de son propos, il est logique d’imaginer que le chef de l’Etat appellera les ministres européens à peser de tout leur poids pour faire barrage à « l’exploration » du CIO, soutenue depuis le début de l’année par les instances continentales du mouvement olympique, mais aussi par les Etats-Unis. Pour Volodymyr Zelenskyy, tout drapeau neutre derrière lequel se rangerait une délégation d’athlètes de Russie serait « taché de sang ».
Avec Lucy Frazer, appelée à présider la réunion, Volodymyr Zelenskyy pourra compter sur une alliée à sa cause. « Nous approchons d’un année du début de cette invasion barbare, a déclaré la Britannique dans un communiqué. Nous devons exhorter le CIO à montrer que les valeurs olympiques ont un sens. Nous devons faire comprendre qu’il y a des conséquences à cette invasion illégale. Nous ne pouvons pas permettre aux athlètes russes de s’aligner aux côtés de Team GB et de tous les autres sur la scène mondiale. »
En face, le CIO reste droit dans ses bottes. L’instance olympique n’entend pas se laisser imposer une conduite par les dirigeants politiques de quelques poignées de pays européens. Son président, Thomas Bach, a même haussé le ton face à l’Ukraine, avant la réunion des ministres initiée par la Grande-Bretagne.
Dans un courrier en date du 31 janvier, révélé jeudi 9 février par le Comité olympique ukrainien, le dirigeant allemand rappelle l’Ukraine et le président de son comité olympique, Vadym Guttsait (également ministre des Sports), à leur devoir de respect de la Charte olympique. Il explique que la position de Kiev va « à l’encontre des fondamentaux du mouvement olympique ».
Thomas Bach poursuit : « Comme l’histoire l’a montré, les précédents boycotts n’ont pas atteint leurs objectifs politiques et n’ont servi qu’à punir les sportifs (…) Tout boycott est une violation de la Charte olympique ».
Surtout, le président du CIO rappelle l’essentiel : rien n’est encore fait, et donc décidé, quant à une possible participation des athlètes russes et biélorusses aux compétitions internationales, et moins encore aux Jeux de Paris 2024.
« La participation d’athlètes neutres dotés d’un passeport russe et biélorusse aux Jeux olympiques de Paris 2024 n’a même pas encore été discutée en termes concrets, a écrit Tomas Bach dans son courrier à Vadym Guttsait. Par conséquent, votre lettre adressée à vos collègues des comités nationaux olympiques, aux fédérations internationales, aux membres du CIO et aux futurs hôtes olympiques, faisant pression sur eux dans le but d’influencer publiquement leur prise de décision, a été perçue par la grande majorité d’entre eux comme étant, à tout le moins, extrêmement regrettable. »