Le COJO Paris 2024 aime les sondages. Il ne s’est jamais interdit d’en commander, pour mesurer le soutien des Français au projet olympique ou, plus récemment, leur perception de la mascotte des Jeux, l’inattendu bonnet phrygien.
Mais la dernière enquête d’opinion n’est pas de celles dont on affiche fièrement les résultats dans le hall d’accueil. Réalisée par Odoxa pour Winamax et RTL, elle appuie là où ça fait le plus mal, à un peu plus de 500 jours de l’ouverture des Jeux olympiques : le prix des places.
Une tendance forte se dégage de la consultation, effectuée les 1er et 2 mars auprès d’un échantillon de 1.005 personnes âgées de 18 ans ou plus. Sans la moindre surprise, elle rejoint les très nombreux témoignages d’internautes recueillis par les médias, français et étrangers, depuis l’ouverture le 15 février de la première phase de la billetterie : les places sont chères, beaucoup trop chères pour un nombre grandissant de postulants.
Pour plus de huit Français sur dix interrogés par Odoxa (82 %), les billets pour assister aux Jeux olympiques de Paris 2024 ne sont pas accessibles. Et ils sont quasiment aussi nombreux (79 %) à estimer que la procédure mise en place par le COJO pour cette première phase, dédiée aux packs de trois places, manque cruellement de simplicité.
En tout juste deux semaines, la promesse du COJO d’un rendez-vous olympique accessible à tous a donc déjà volé en éclats. Les fameux billets à 24 euros, au nombre d’un million selon les organisateurs (mais dont près de la moitié a été réservée par l’Etat dans le cadre d’une billetterie solidaire), ont échappé à l’immense majorité des premiers tirés au sort. A la place, ils ont découvert une grille tarifaire très éloignée de leurs attentes, avec l’obligation d’acheter au moins trois places pour des sessions différentes.
L’agence Associated Press cite le témoignage d’une professeure d’anglais installée à Paris, tirée au sort la semaine passée pour accéder à la plateforme de vente. Elle explique qu’elle avait initialement ciblé trois sports – BMX, water-polo et football – pour partager l’expérience olympique avec son fils de 9 ans. Mais deux d’entre eux étaient déjà complets.
Il restait des places pour le tournoi de football, à 50 euros, mais il lui fallait composer son pack avec deux autres disciplines. Jusque-là, rien de très inattendu. Les règles étaient connues d’avance. Les prix des sessions possibles, eux, l’étaient moins : 150 euros pour du basket-ball ou du handball, 230 euros pour de la natation, 690 euros pour une session de qualifications en athlétisme.
« Qui peut se permettre des billets à ce prix ?, interroge-t-elle. Moi, je ne peux pas. Je voulais vraiment avoir des billets pour les Jeux olympiques. Je voulais que mon fils vive cette expérience unique… dans notre ville. Mais j’ai perdu mes illusions avec les prix constatés. C’est tout simplement insensé. »
Elle a renoncé et refermé son ordinateur sans boucler ses emplettes. Elle n’est pas la seule.
Les prochaines phases de la billetterie inverseront-elles la tendance ? Le COJO l’espère. La deuxième étape, elle aussi précédée par un tirage au sort – ouvert le 15 mars – doit débuter le 11 mai. Elle concernera les places à l’unité.
Cette fois, pas de risque de buter sur une procédure complexe. Et nul besoin de composer un pack de trois places, avec le sentiment de devoir en acheter deux pour des sessions non voulues pour en assurer une pour un sport de son choix.
Mais les prix, eux, s’annoncent au moins aussi dissuasifs que pour la première phase. Le COJO n’a jamais caché que les places les plus convoitées – finales d’athlétisme, de natation, de certains sports collectifs, mais aussi les cérémonies – ne seraient pas proposées dans les packs, mais seulement lors de la vente à l’unité. Mais, très prudent dans sa communication, il n’a pas dévoilé la grille tarifaire de ces sessions potentiellement les plus demandées.
Elle s’annonce spectaculaire. Difficile, en effet, d’imaginer des places « accessibles » pour une soirée d’athlétisme au Stade de France lorsqu’il en coûte plus de 100 euros pour un siège en haut des tribunes lors d’une session sans la moindre finale. Difficile, également, d’espérer vivre « l’expérience spectateur » d’une rencontre décisive dans un sport collectif, sachant qu’il en coûte 130 euros pour un seul match de la phase préliminaire du tournoi féminin de volley-ball.
Conséquence prévisible : la vague de mécontentement qui ne cesse de monter dans l’opinion depuis l’ouverture de la billetterie affecte l’image des Jeux. A un peu plus de 500 jours, elle reste majoritairement positive. Le sondage publié dimanche 5 mars révèle que, pour 69 % des Français, l’organisation à Paris du rendez-vous olympique et paralympique est « une bonne chose ». Mais ce résultat marque un recul de cinq points par rapport à octobre 2021.
Pour le reste, il ressort de l’enquête une attente certaine des Français pour la cérémonie d’ouverture sur la Seine, plébiscitée par 61 % des sondés (+8 points par rapport à octobre 2022), et l’idée partagée par la majorité (64 %) que les Jeux de Paris 2024 permettront de créer des opportunités économiques pour la France et les Français.
Mais, mauvais point pour le COJO, ils sont également une forte majorité (64 %) à ne pas avoir confiance dans les organisateurs pour maîtriser le coût de l’évènement et présenter au final un budget à l’équilibre.