La porte s’ouvre. Pas encore en grand, certes, mais largement assez pour y passer un pied. Deux jours après la décision de la Fédération internationale d’escrime (FIE) de réintégrer les athlètes russes et biélorusses dans les compétitions internationales, une autre voix du mouvement olympique s’est fait entendre pour exprimer son soutien au retour des deux pays belligérants.
Réunis en forum samedi 11 et dimanche 12 mars à Alger, à l’initiative de l’Association des comités nationaux olympiques africains (ACNOA), les représentants des athlètes d’Afrique se sont exprimés à leur tour en faveur d’une levée de la suspension des sportifs russes et biélorusses.
Le forum de l’ACNOA a rassemblé dans la capitale algérienne plus d’une centaine d’athlètes du continent, représentant cinquante commissions nationales des athlètes de comités nationaux olympiques. Au terme des échanges, une unanimité s’est dégagée en faveur de la positon du CIO sur la question russe et biélorusse.
Surprenant ? Pas vraiment. A Alger, les athlètes africains n’ont finalement fait que suivre la résolution adoptée par le bureau exécutif de l’ACNOA, le 3 mars. A l’image de leur instance continentale, ils se rangent en bon ordre derrière le CIO dans sa volonté « d’explorer une voie » permettant aux délégations russe et biélorusse de participer aux Jeux de Paris 2024.
Au terme de son forum, l’ACNOA a publié un communiqué succinct, où elle explique que les athlètes, « dans leurs discussions, ont réaffirmé que les sportifs ne devraient jamais payer le prix d’un conflit, quel qu’il soit et où qu’il se trouve. » Le document poursuit : « La politique ne doit pas mettre la pression sur le sport pour s’éloigner de ses valeurs fondamentales de solidarité et d’unité. »
En soi, la position des athlètes africains n’a rien de très inattendu. Il aurait été étonnant de les voir exprimer leur défiance à l’égard de leur instance continentale, surtout sur le terrain même du président de l’ACNOA, l’Algérien Mustapha Berraf. L’unanimité, en revanche, surprend un peu, surtout dans le mouvement olympique africain où les débats sont toujours très animés et le consensus souvent difficile à trouver.
Que faut-il en conclure ? Deux choses. La première était prévisible : le mouvement olympique ne s’écarte pas de la ligne fixée par le CIO sur la question russe et biélorusse. L’Asie l’a montré la première, dès la fin de l’an passé, lorsque son conseil olympique, l’OCA, est allé jusqu’à proposer de jouer les poissons-pilotes en accueillant les athlètes des deux pays dans ses compétitions continentales, dont les prochains Jeux Asiatiques. L’Afrique lui emboite le pas. Le reste du cortège devrait suivre, avec plus ou moins de conviction, mais sans oser s’écarter de la route.
Deuxième leçon : les athlètes se montrent, eux aussi, solidaires d’un retour des athlètes russes et biélorusses. Ils ont encore été peu nombreux à exprimer ouvertement un avis sur la question. Les Africains sont les premiers à adopter une position à la fois tranchée et unanime. Ils ne seront sûrement pas les derniers.
Au-delà d’un discours déjà maintes fois entendu, où revient le refrain de l’impérieuse nécessité de séparer le sport et la politique, les athlètes africains insistent sur un principe : les sportifs ne « devraient jamais payer le prix d’un conflit. » Ils savent trop bien que la situation des athlètes russes et biélorusses, écartés de la scène sportive depuis plus d’un an, pourrait devenir un jour la leur, pour peu que leurs dirigeants politiques se mettent en tête de pointer leurs canons vers un pays voisin. En Afrique, le risque existe, sans doute plus encore que dans certaines autres parties du monde.