La parenthèse est refermée. Enfin. Mais elle ne change pas encore le cours de l’histoire. Réuni cette semaine pendant trois jours, le Conseil de la Fédération internationale d’athlétisme (World Athletics) a annoncé, jeudi 23 mars, sa décision de lever la suspension pour dopage de l’athlétisme russe. Mais, dans le même temps, les athlètes russes et biélorusses restent interdits de compétitions internationales en raison de l’offensive militaire en Ukraine.
Un obstacle est levé, donc. Un autre reste. La fédération russe (RusAF) était suspendue depuis le mois de novembre 2015. Son exclusion a duré plus de sept ans, un record, empêchant ses athlètes de participer sous leurs couleurs aux événements majeurs du calendrier international, dont les Mondiaux et les Jeux olympiques.
Mais le bout du tunnel reste lointain. Sans surprise, le Conseil de World Athletics a prolongé l’exclusion des athlètes russes et biélorusses des compétitions internationales, décidée en mars 2022. La sanction restera maintenue jusqu’à « un avenir prévisible ». Elle s’accompagne de l’interdiction pour la Russie et la Biélorussie d’accueillir « toute manifestation internationale ou européenne d’athlétisme. » Leurs officiels seront interdits d’assister, de s’exprimer et/ou de voter aux réunions du Congrès de World Athletics. L’instance recommande également aux organisateurs de compétitions, dont les meetings de la Ligue de Diamant et du Continental Tour, d’appliquer les mêmes mesures.
La route des Jeux de Paris 2024 reste donc bouchée pour les athlètes russes, alors que la période de qualification a débuté dans certaines disciplines, dont le marathon, la marche et les épreuve combinées.
Pour la RusAF, en revanche, une nouvelle ère vient de s’ouvrir. World Athletics explique dans un communiqué que son Conseil a approuvé la recommandation de la task force sur la Russie de réintégrer la fédération « après avoir satisfait à toutes les exigences du plan de réintégration. »
Mais, précision d’importance, le feu vert de World Athletics reste teinté d’orange. Certes, la suspension de la RusAF est levée, mais elle devra se conformer à une série de 35 « conditions spéciales ». Elles sont censées garantir que les réformes antidopage « restent en place et continuent de fonctionner efficacement. »
La RusAF restera surveillée de très près par World Athletics. Une forme de tutelle, en somme, dans des domaines aussi variés que la gouvernance, la « protection contre les influences et les contrôles externes inappropriés », la capacité opérationnelle, le budget et la gestion fiscale.
Ces « conditions spéciales » seront appliquées pendant une période de trois ans, avec un examen à la fin de cette période pour déterminer s’il est nécessaire ou non de les maintenir pour un nouveau bail.
Par ailleurs, la task force dirigée par Rune Andersen a confirmé que la RusAF avait payé tous les coûts du processus de réintégration jusqu’à la fin de l’année 2022. Mais il lui faudra encore régler à World Athletics les dépenses consenties pour la période allant de janvier à mars 2023.
Autre décision prise cette semaine par le Conseil de World Athletics : l’exclusion des athlètes transgenres de la catégorie féminine. Une mesure radicale justifiée par Sebastian Coe, le président de l’instance, par une volonté de « protéger la catégorie féminine. »
En début d’année, World Athletics avait laissé entendre qu’elle pourrait durcir son règlement sur la participation des athlètes transgenres. En fait de durcissement, elle a opté pour une voie nettement plus radicale, en leur fermant la porte des compétitions. Sebastian Coe l’a expliqué par un vide scientifique sur le sujet. « Pour beaucoup, les preuves que les femmes trans ne conservent pas un avantage sur les femmes biologiques sont insuffisantes, a déclaré le Britannique. Ils veulent plus de preuves. Nous avons besoin d’en savoir plus dès maintenant. Mais nous ne disons pas non à tout jamais. »
Les athlètes intersexes, dont la Sud-Africaine Caster Semenya, restent admises dans les compétitions internationales. Mais le Conseil de World Athletics a encore durci les conditions de leur participation aux épreuves féminines. Il leur faudra désormais maintenir leur taux de testostérone sous le seuil de 2,5 nmol/L pendant 24 mois, et non plus 5 nmol/L pendant 6 mois.
Mais Sebastien Coe l’a précisé : une période de transition est proposée aux treize athlètes intersexes recensées par World Athletics. Elle devront faire baisser leur taux de testostérone pendant 6 mois, cette année, au lieu des 24 mois qui seront exigés après cette phase transitoire.
Surtout, le nouveau règlement adopté par le Conseil s’applique à toutes les disciplines de l’athlétisme, plus seulement aux courses allant du 400 m au mile. Le changement est d’importance. Il ne laissera plus aux athlètes concernées l’option de changer de distance pour poursuivre leur carrière sportive sans avoir à subir un traitement hormonal.