Les planètes s’alignent. Pour les organisateurs de la Coupe du Monde de rugby 2023 en France et ceux des Jeux de Paris 2024, le compte-à-rebours est passé d’un futur lointain à un avenir désormais proche. Un peu plus de cinq mois pour le rendez-vous mondial du ballon ovale, moins de 500 jours pour l’événement olympique et paralympique.
Dans les villes-hôtes, l’allure accélère au même rythme. Sans temps mort. Regroupées au sein d’une association, Territoires d’événements sportifs (TES), elles ont tenu vendredi 24 mars leur conseil d’administration. A cette occasion, leur président, Mathieu Hanotin, maire de Saint-Denis et président de Plaine Commune, a répondu aux questions de FrancsJeux.
FrancsJeux : La ville de Paris a récemment annoncé l’installation d’un Village Rugby pendant la Coupe du Monde 2023. Toutes les villes-hôtes adopteront-elles le même modèle ?
Mathieu Hanotin : Oui. Le modèle pourra être différent d’une ville à l’autre, car la réalité de la Coupe du Monde ne sera pas la même entre Saint-Denis et Nantes, par exemple. Mais le principe d’une fan zone organisée à la façon d’un village rugby (photo ci-dessus) a été adopté par les dix villes-hôtes. Elle sera parfois ouverte seulement les jours de match, mais l’idée est de proposer une animation en dehors du stade et d’accompagner le parcours de l’équipe de France. A Saint-Denis, elle sera installée au pied de la Basilique et restera ouverte du premier au dernier jour du tournoi. Pour les villes, cela représente un coût important, d’autant qu’elles ne peuvent plus s’appuyer sur la taxe sur les spectacles. Mais nous avons obtenu, au terme d’une négociation, une subvention du GIP France 2023 (le comité d’organisation de la Coupe du Monde de rugby) à hauteur de 100.000 euros par ville-hôte et de World Rugby la possibilité de conclure des partenariats locaux.
Il avait également été évoquée un moment l’idée de marchés du rugby, destinés à profiter du Mondial 2023 pour promouvoir les produits du terroir. A-t-elle été abandonnée ?
Non. L’idée était portée par Claude Atcher, l’ancien directeur général de France 2023, mais elle avait été mise en sommeil car imaginée d’abord à proximité des stades, une formule qui ne fonctionnait pas. Nous l’avons réactivée avec le GIP France 2023 et le ministère de l’Agriculture. Mais il a été décidé d’intégrer ces marchés aux Villages Rugby. Les jours d’ouverture, une offre de produits du terroir sera proposée aux supporteurs, sur un espace de vente et dégustation pouvant aller de 180 à 540 m2. Ces marchés du rugby permettront de valoriser l’agriculture biologique et le savoir-faire français, notamment auprès des visiteurs étrangers. Une subvention de l’Etat de 2 millions d’euros a été allouée à ce dispositif, soit 200.000 euros par ville-hôte.
Il est beaucoup question d’héritage, désormais, dans l’organisation des grands événements sportifs. Comment les villes-hôtes du Mondial de rugby 2023 pourront-elles concrètement en bénéficier ?
Cette question est déterminante. Elle a été l’objet de discussions très en amont du tournoi. Nous avons tenté d’expliquer à l’Etat la nécessité de matérialiser un héritage immédiat, sans attendre les retombées du tournoi. La Coupe du Monde va créer une dynamique autour du rugby. Il faudra que les clubs soient en capacité d’accueillir les jeunes intéressés à prendre une licence. Dans le cas contraire, nous passerons à côté de quelque chose. Nous avons obtenu une subvention de 224.000 euros d’avance par ville-hôte. Elle sera versée au cours du premier semestre 2023, donc avant même le début du Mondial. Elle pourra financer des projets d’équipement : construction de nouveaux terrains, passage à un gazon synthétique, installation d’une salle de musculation… Il reste à se mettre d’accord sur le périmètre exact de répartition des bénéfices après le tournoi. Une proportion de 70 % ira à la Fédération française de rugby (FFR), 30 % allant à l’ensemble des collectivités.
Passons aux Jeux de Paris 2024. Etes-vous satisfait de l’offre de billetterie proposée par le COJO aux villes-hôtes de l’événement ?
Sur cette question, il faut distinguer la théorie et la pratique. La copie présentée par Paris 2024, avec la moitié des places à 50 euros ou moins, et un volume important de billets à 24 euros, était très satisfaisante. Je n’ai jamais trouvé anormal que certaines places soient très chères. En plus, nous avons obtenu la mise en place d’une billetterie sociale, financée par le fonds de dotation du COJO Paris 2024, et d’une billetterie territoriale, qui permet aux villes-hôtes d’acheter des places à leur prix facial. A Saint-Denis, par exemple, nous allons ainsi pouvoir permettre à des milliers d’habitants d’assister à une épreuve des Jeux. Mais la réalité s’est révélée plus difficile pour les villes où les sites de compétition affichent des jauges de spectateurs plus réduites. Certains de mes collègues élus n’ont pas du tout été satisfaits de ce qui leur a été proposé. Il faut monter le ton. Mais nous allons trouver un accord. Nous y travaillons.
Vous avez régulièrement dénoncé, en votre qualité de maire de Saint-Denis et président de TES, les « coûts cachés » des Jeux de Paris 2024. Quels sont-ils ?
Il faut bien comprendre que le COJO est en charge de tout ce qui se trouve à l’intérieur des sites, et avec l’Etat de la sécurité du dispositif. Mais le reste est du ressort des collectivités. La signalétique ou le look, par exemple, depuis un transport public jusqu’au site olympique. Toute l’animation en ville, également. L’entretien forcément supplémentaire de l’espace public. Certains de ces coûts sont parfois identifiés, d’autres ne le sont pas. Pour cette raison, nous avons des désaccords avec le COJO et avec l’Etat. Bien sûr, nous sommes très heureux d’accueillir les Jeux. Les villes en bénéficieront, notamment en termes de rayonnement. Nous sommes très engagés dans leur réussite, depuis le premier jour. Et nous le serons jusqu’au bout. Mais on ne peut pas toujours demander l’impossible aux villes-hôtes.