La porte leur est ouverte. Au moins en théorie. Mais, dans la pratique, l’entrée dans les compétitions internationales s’avère plus complexe que prévu pour les escrimeurs russes.
Depuis le vote de la Fédération internationale d’escrime (FIE), le 10 mars dernier, en faveur d’un retour des athlètes russes et biélorusses à compter de ce mois d’avril, pour le début de la période de qualification aux Jeux de Paris 2024, il leur est désormais possible de retrouver leur place sur le circuit international. Mais il reste difficile d’avancer avec certitude que les escrimeurs russes pousseront réellement la porte d’une étape de la Coupe du Monde.
La Fédération russe d’escrime l’a annoncé dimanche 2 avril, par la voix de son président, Ilgar Mamedov : elle n’enverra aucun athlète à Poznan, en Pologne, pour la Coupe du Monde de fleuret féminin. L’épreuve est prévue du 21 au 24 avril. Elle est la première du long processus de qualification aux Jeux de Paris 2024.
« Les fleurettistes russes concourront-elles en Pologne ? Bien sûr que non, c’est inacceptable », a-t-il déclaré dimanche, cité par l’agence de presse Ria Novosti.
En cause, les conditions imposées par la fédération polonaise pour participer à la compétition. Elles précisent que les fleurettistes russes et biélorusses devront signer un document écrit attestant qu’elles ne soutiennent pas l’offensive en Ukraine et ne sont pas employées par l’armée ou par un organe de sécurité.
La Fédération russe d’escrime les rejette en bloc. Le comité national olympique (ROC) avait opposé la même fin de non-recevoir aux conditions de neutralité suggérées par le CIO pour un retour éventuel des athlètes russes et biélorusses.
« La Fédération polonaise a oublié qu’elle était une instance sportive, pas politique, a insisté Ilgar Mamedov. Malheureusement, tout est mélangé. Sa déclaration est spécifiquement politique, elle rien à voir avec le sport. Ces conditions provocatrices ne nous permettront pas de participer à ces compétitions. Tout est fait pour cela. »
Le dirigeant russe l’a expliqué à l’AFP : les conditions imposées par la Pologne ne sont pas seulement politiques, elle empêchent en pratique un retour d’une partie de l’élite de l’escrime russe sur la scène internationale. « Nos meilleurs sportifs sont issus soit du CSKA, soit du Dynamo », rappelle Ilgar Mamedov. Les deux grand clubs de Moscou, créés il y a un siècle, sont tous les deux étroitement liés à l’armée russe.
Ce premier renoncement pourrait en appeler d’autres. La Pologne, notamment, se dit déterminée à faire obstacle à une présence des athlètes russes et biélorusses dans ses compétitions. En tête de liste, les prochains Jeux européens, prévus du 21 juillet au 2 juillet 2023 à Cracovie et dans la région de la Malopolska.
Marcin Nowak, le patron du comité d’organisation, l’a assuré la semaine passée lors d’une interview à une radio nationale : « Sous aucun prétexte et d’aucune manière, les sportifs représentant la Russie et la Biélorussie ne prendront part à nos épreuves ». Le Polonais a même suggéré que les épreuves où les fédérations internationales décideraient finalement de ne pas inclure les Jeux européens 2023 dans le processus de qualification aux Jeux de Paris 2024, en raison de l’opposition polonaise à une présence russe et biélorusse, « n’auront tout simplement pas lieu. »
La Pologne n’est pas le seul pays où la perspective d’un retour des athlètes russes et biélorusses a conduit le mouvement sportif à prendre des mesures radicales. L’Allemagne et la France ont déjà annulé chacune une étape de la Coupe du Monde d’escrime. Le Danemark les a suivies en rayant de son calendrier un tournoi satellite du circuit international de la discipline.
A moins de 500 jours des Jeux de Paris 2024, le retour des athlètes russes et biélorusses reste encore très hypothétique. Certes, le CIO l’a formellement recommandé aux fédérations internationales. Mais toutes ne suivront pas ses consignes. Et, pour celles qui soutiendront sa recommandation, il faudra slalomer entre les annulations d’épreuves et les conditions imposées par les autorités politiques et/ou sportives des pays.
A la lecture des derniers événements, il semble désormais possible, voire probable, que la question de la présence russe aux Jeux de Paris 2024 se règle toute seule, sans décision formelle du CIO. Par une impossibilité des athlètes de décrocher leur qualification, et un refus de la Russie d’accepter les conditions imposées par le mouvement olympique.