Les choses peuvent changer très vite dans le mouvement olympique. Une année en arrière, la ville japonaise de Sapporo avançait d’un bon pas en tête du maigre défilé des candidats aux Jeux d’hiver 2030. Frappé de plein fouet par le scandale de corruption lié aux Jeux de Tokyo 2020, le projet a été mis en pause en décembre dernier. Les résultats d’un récent sondage mené dans la capitale de la préfecture d’Hokkaido suggèrent qu’il pourrait ne jamais revoir le jour.
Réalisée par téléphone en tout début de mois pour le quotidien Asahi Shimbun, l’enquête d’opinion révèle que 47 % des habitants de Sapporo sont aujourd’hui opposés à une candidature olympique. Près d’un sondé sur deux, donc. Dans le camp d’en face, ils sont seulement 38 % à se déclarer favorables.
Autre leçon à retenir du sondage, réalisé auprès d’un échantillon de près de 800 personnes : la question olympique devrait jouer un rôle important, voire majeur, dans les prochaines élections municipales à Sapporo. Le scrutin doit se tenir dimanche 9 avril.
Le maire sortant, Katsuhiro Akimoto, brigue un troisième mandat consécutif. Il est un fervent partisan de la candidature aux Jeux d’hiver, ne l’a jamais caché, suggérant à plusieurs reprises, avant le scandale de corruption des Jeux de Tokyo, qu’il ne serait pas nécessaire d’en passer par un référendum, les sondages étant tous favorables au projet.
Seul ennui, mais de taille : l’idée olympique a vu ses soutiens fondre comme la glace au cours des derniers mois. Et Katsuhiro Akimoto fait face pour conserver la mairie à la concurrence de deux autres candidats, Kaoru Takano et Hideo Kibata, tous deux clairement hostiles à une candidature.
A en croire l’enquête d’opinion publiée par l’Asahi Shimbun, plus de la moitié (56 %) des personnes interrogées expliquent que la position des candidats sur le dossier Sapporo 2030 influencera leur vote. Katsuhiro Akimoto devra jouer serré, voire sacrifier son projet olympique pour garder son fauteuil.
Plus inquiétant : près de huit habitants sur dix (79 %) estiment qu’un référendum devrait être organisé pour approuver la candidature aux Jeux d’hiver. Dans un tel scénario, il semble peu probable aujourd’hui que le oui l’emporte.
Aux oubliettes, le projet Sapporo 2030 ? Au Comité olympique japonais (JOC), le discours officiel continue à prétendre que le dossier n’est pas enterré, seulement mis en pause. Mais les mois passent. Et la machine n’est toujours pas relancée.
Avec un plan B – Salt Lake City – nettement plus taillé pour l’édition 2034, l’attribution des Jeux d’hiver 2030 est en train de prendre une tournure totalement imprévisible seulement quelques mois en arrière.
La Suède est sortie du bois la première, en début d’année, ressortant des placards son projet pour les Jeux d’hiver en 2026, où le binôme Stockholm/Are avait été devancé par les Italiens de Milan-Cortina. Depuis, les Suédois travaillent. Le CIO leur a accordé du temps en annonçant repousser à la session de Paris, en juillet 2024, l’attribution du rendez-vous olympique et paralympique. Ils en profitent.
Surtout, la Suisse a glissé à son tour un pied dans la porte. Son comité national olympique, Swiss Olympic, a annoncé la semaine passée avoir demandé au CIO de remonter d’un cran son nom sur la feuille de bal des prétendants. Jusque-là cantonnée à un « dialogue informel » avec la commission du futur-hôte, elle est passée à un « dialogue continu ». En clair, elle a abandonné ses échanges sans lendemain pour entamer des discussions sérieuses.
Pour un pays où une cruelle succession d’échecs dans les candidatures, et la perspective toujours terrifiante d’une « votation » sur la question olympique, imposent une extrême prudence, la nuance n’est pas anodine. La Suisse se remet à rêver aux Jeux. Elle se dit surtout que le désert actuel de la campagne pour l’édition 2030 lui ouvre un boulevard et lui offre une chance historique.
A Lausanne, au siège du CIO, ils sont nombreux à voir l’avenir par le même prisme.