Paradoxe. Deux mois presque jour pour jour ont passé depuis la recommandation de la commission exécutive du CIO aux fédérations internationales de réintégrer les athlètes russes et biélorusses dans leurs compétitions. Elles sont désormais plus d’une douzaine à s’être rangées dans le camp de l’instance olympique, contre une petite poignée (athlétisme, badminton, équitation, surf…) à rester opposées à un retour des deux deux pays. Mais pour les sportifs russes, rien n’a vraiment changé. Ils restent bloqués à la porte.
Dernier exemple en date : le Grand Prix d’haltérophilie de Cuba, une épreuve inscrite au calendrier de la fédération internationale (IWF), prévu du 8 au 18 juin 2023 à La Havane. La compétition entre dans le processus de qualification pour les Jeux de Paris 2024.
Le service de presse de l’IWF l’a expliqué via un communiqué : les haltérophiles russes ne participeront pas à l’épreuve cubaine. Ils en auraient pourtant le droit, le comité exécutif de la Fédération internationale d’haltérophilie ayant autorisé officiellement, le 12 mai dernier, les représentants russes et biélorusses à retrouver leurs places sur les plateaux, à titre individuel et sous statut neutre.
Pour être considérés comme éligibles, les athlètes des deux pays doivent remplir une déclaration individuelle, où ils confirment par écrit n’avoir actuellement aucun lien contractuel avec les forces armées, les agences de sécurité de l’État ou d’autres structures apportant un soutien à la guerre en Ukraine. Le document doit être ensuite soumis à l’IWF pour analyse et, éventuellement, validation pour la participation à une compétition.
Jusque-là, rien de très inattendu. Toutes les fédérations internationales ayant suivi la recommandation du CIO sur la question russe et biélorusse ont mis en place une démarche comparable. Mais à en croire l’IWF, « aucune déclaration signée n’a été reçue de la part d’athlètes ou de personnel d’encadrement disposant d’un passeport russe avant la fin du délai fixé (15 mai 2023) ».
Résultat : la Russie sera absente du Grand Prix de Cuba à La Havane, le mois prochain, comme elle l’a été de toutes les compétitions internationales depuis le début du conflit en Ukraine. Elle se prive ainsi de marquer des points dans la perspective des Jeux de Paris 2024.
L’IWF insiste dans son communiqué : « Les haltérophiles et le personnel avec des passeports russes ont perdu la possibilité de participer à la prochaine épreuve de l’IWF à Cuba. L’IWF a donné une chance égale et équitable aux athlètes et au personnel de soutien des deux pays concernés de participer au Grand Prix à La Havane. Ces recommandations sont conformes aux directives du CIO. »
Dans le même temps, l’instance mondiale de l’haltérophilie explique avoir reçu des déclarations individuelles signées de treize athlètes biélorusses. Elles ont été validées. Les haltérophiles pourront donc participer à l’épreuve cubaine sous un statut neutre. La délégation biélorusse comptera également six membres d’encadrement, dont deux entraîneurs et un officiel.
La Fédération russe d’haltérophilie n’a pas commenté l’annonce du comité exécutif de l’IWF. Elle n’a pas non plus fourni d’explication à son renoncement à participer au Grand Prix de la La Havane, dont les portes lui étaient pourtant théoriquement ouvertes.
A ce jour, la Russie a participé à trois championnats du monde depuis la recommandation de la commission exécutive du CIO de réintégrer ses athlètes. Elle était représentée sous ses propres couleurs aux Mondiaux de boxe, féminins puis masculins, l’instance internationale de la discipline (IBA) ayant accepté les boxeurs russes bien avant le retournement de veste du CIO. Puis elle a envoyé une équipe aux Mondiaux de judo, en début de mois à Doha.
Dans les autres sports, son retour sur la scène internationale reste seulement théorique. Pour l’essentiel, il est ralenti ou empêché par une processus d’éligibilité des fédérations internationales encore en préparation, voire seulement à l’état de projet.
Dans le cas de l’haltérophilie, le renoncement semble être le fait des Russes eux-mêmes. A moins de 450 jours des Jeux de Paris 2024, il interroge.